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transportparis - Le webmagazine des transports parisiens

T6 : Châtillon-Montrouge - Viroflay

La desserte du plateau de Vélizy a fait l’objet de plusieurs types de projet depuis le développement de l’urbanisation de cette zone dès la fin des années 1960. Il fut notamment question de prolonger la ligne 13 du métro depuis le terminus de Châtillon-Montrouge ou de créer des systèmes de transports innovants automatisés, mais aucun ne fut concrétisé.

Dès la mise en service de la ligne 14 Montparnasse - Porte de Vanves en 1937, les études du prolongement à Clamart furent engagées. Interrompues par la guerre, elles reprenaient dès la fin des années 1940 mais buttaient sur la problématique des carrières. En 1963, le plan municipal de Vélizy actait la demande du prolongement de la ligne et les études figuraient au 4ème plan pour le district parisien. En 1976, lors du prolongement du métro à Châtillon-Montrouge, le tracé jusqu'à Vélizy figurait en pointillés sur les plans mais les décisions ministérielles avaient choisi de favoriser l'extension à Créteil. Et depuis la réutilisation de la plateforme de la ligne Paris - Massy - Gallardon - Chartres par la LGV Atlantique, l'hypothèse du prolongement Vélizy s'est envolée.

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Paris - Porte d'Orléans - 15 janvier 2012 - Situation de départ avant la mise en service de T6 : la ligne 295 rejoignait directement Paris et proposait donc un double accès au Métro par les lignes 13 à Châtillon et 4 à la porte d'Orléans. Le 295 - tout comme le 194 - ont épuisé des Agora S de première génération, reconnaissables à la petite bande grise inférieure et à la bande verte sous les baies. © transportparis

Sur pneus dès le départ

En 2000, le Contrat de Plan Etat-Région 2000-2006 inscrivait la création d’un TCSP entre la ligne 13 et la zone d’emplois de Vélizy Villacoublay, prolongée jusqu’aux gares de Viroflay Rive Gauche (RER C et ligne N) et Rive Droite (ligne L, groupe II de Saint Lazare) sur une longueur de 14 km.

C’est sur cette base que fut lancée la concertation préalable à l’été 2001 et que le schéma de principe était adopté le 10 octobre 2002 par le STIF. L’avant-projet réalisé en 2004 permit d’aller en enquête publique au début de l’année 2005 et le 9 février 2006, le projet était déclaré d’utilité publique. La convention de financement avec l’Etat (16%), la Région (50%) et les Départements (20% pour les Hauts de Seine et 13% pour les Yvelines) ainsi que la RATP (1%) était approuvée par le STIF le 10 décembre 2008.

Le projet prévoyait une ligne de tramway sur pneus dès ses origines, écartant le roulement classique en se laissant convaincre par les arguments selon lesquels les tramways ne sauraient franchir de fortes rampes. En dépit de l’expérience de nombreux réseaux dans le monde entier avec des pentes pouvant dépasser 10% et atteindre 14% à Lisbonne (il est vrai avec un matériel très particulier), il était parfaitement possible de motoriser un tramway classique pour franchir une pente de 10% située dans une longue interstation qui plus est à l’émergence du tunnel de Viroflay.

Ainsi, toute discussion sur le type de matériel roulant était impossible. Pourtant, la pertinence du choix du Translohr est loin d’être avérée et relève de considérations excluant la rationalité technique et le bénéfice pour la collectivité et les usagers.

Une ligne assez rectiligne mais avec un tunnel

Outre la singularité du roulement sur pneumatiques, la particularité de T6 est de comprendre une section souterraine de 1600 m passant sous la forêt de Meudon et sous la ville de Viroflay dont la topographie très difficile n’est objectivement pas compatible avec l’exploitation efficace d’un tramway, d’autant plus que les deux gares de Viroflay sont insérées dans un environnement urbain assez exigu. Le choix du tunnel était donc logique, en dépit du coût, mais il avait l’avantage de proposer une connexion intéressante de T6 avec de multiples lignes ferroviaires de l’ouest parisien (RER C, ligne L, ligne N). Le tunnelier fut baptisé Nolwenn et provenait des travaux de prolongement de la ligne 12 du métro à Aubervilliers.

Le tracé de Chatillon à Vélizy est assez rectiligne hormis l’insertion dans Meudon la Forêt afin de toucher un maximum de population, en suivant globalement le parcours de l’ancienne ligne 295 d’autobus. En outre, les interstations sont assez longues, procurant un terrain propice à une vitesse commerciale soutenue, dès lors que la gestion de la priorité aux carrefours fonctionne correctement.

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Clamart - Avenue de Verdun - 15 novembre 2014 - La marche à blanc du T6 a permis ce cliché de la transition entre le 295 (qui avait été équipé en Citaro dans le cadre du rajeunissement du parc d'autobus) et le Translohr. © transportparis

La ligne fut mise en chantier dès 2007, d’abord pour les travaux préliminaires de déviation de réseaux souterrains puis en 2008 pour la construction de l’atelier de maintenance puis de la plateforme du TCSP. Les travaux s’intégraient dans un réaménagement de la voirie au profit des transports en commun, ce qui est plutôt positif, avec la mise à 2x1 voies de la RD905 entre Châtillon et Meudon la Forêt.

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Châtillon - Carrefour Charles de Gaulle - L'arrivée du T6 a entraîné la restructuration de la RD906 réduite à 2 x 1 voies, ralentissant le service du 295 dans la période transitoire avant mise en service du T6. Quelques Citaro C2 y ont circulé avant la suppression de la ligne. © transportparis

On notera aussi que le terminus de Châtillon Montrouge est déporté de la voirie pour approcher au plus près de l’entrée du terminus du métro. Il ne facilitera pas un éventuel prolongement à la Porte d’Orléans, qui semble logique et au demeurant déjà souhaité par les voyageurs puisque c’était le terminus du 295. L’accès à la Porte d’Orléans donnerait correspondance à T3 et à la ligne 4, ce qui pourrait éviter un trop grand report sur la ligne 13 qui n’est pas précisément réputée pour son insuffisante fréquentation…

Le 13 décembre 2014, la ligne était mise en service de Chatillon à Vélizy, station Robert Wagner, avant le début de la section souterraine. T6 desservait alors 19 stations sur 12,4 km. Le 28 mai 2016, la ligne était prolongée à Viroflay, avec la mise en service de la section souterraine procurant les correspondances ferroviaires dans les deux gares de la commune.

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Viroflay Rive Droite - 28 mai 2016 - Premier jour d'exploitation pour la section souterraine. Les nombreuses connexions ferroviaires favorisent un accès assez commode à l'importante zone d'emplois du plateau de Vélizy-Villacoublay en utilisant logiquement la capacité en contrepointe. © X. Morel

Le matériel roulant

Le 31 août 2010, la RATP passait commande du matériel roulant et du système de guidage breveté auprès de Lohr Industries, seul constructeur de tramway sur pneus dans le monde. 28 éléments de 46 m de long ont été commandés. La reprise des activités de Translohr par Alstom, quelque peu pressé par l’Etat, et le fonds stratégiques d’investissement permirent à l’entreprise d’honorer la commande de la RATP.

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Clamart - Avenue de Verdun - 15 novembre 2014 - Les fortes pentes sur la ligne T6 ont suffi à convaincre des décideurs - aux faibles connaissances techniques  - à s'engouffrer dans la technique "captive" du Translohr... et à quel prix. Le contribuable paiera et l'usager subira... Pour combien de temps ? © transportparis

Les rames STE6 longues de 46 m mais larges de 2,20 m seulement n’offrent que 252 places soit 52 de moins que les rames Citadis 402 d’Alstom livrées pour T3 qui ne mesurent que 43 m de long.

Elles sont entretenues et remisées dans un atelier situé à Vélizy et qui a nécessité la construction d’un raccordement de service au plus juste, passant sous l’autoroute A86.

Le coût du projet atteint 389 M€ auxquels s’ajoutent 137 M€ pour le matériel roulant, financé par le STIF.

Le trafic estimé est de 82 000 voyageurs par jour à l’achèvement de la ligne. Cette évaluation date des origines du projet et fait craindre une saturation à très courte échéance au regard des écarts constatés entre les prévisions et le trafic réel des tramways T1, T2, T3 et T5.

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Clamart - Avenue Charles de Gaulle - 15 novembre 2014 - La plateforme du T6 prévoit tout de même des aménagements assez généreux qui laissent présager de potentielles surlargeurs pouvant être un jour mises à profit pour rentrer dans le rang. On notera tout de même les alignements du tracé propices à une bonne vitesse commerciale © transportparis

Le choix contestable du Translohr

Comme sur T5, le choix du Translohr est contestable puisque le coût de l’infrastructure n’est pas significativement différent de celui d’une ligne tramway classique. En revanche, le coût du matériel rapporté à sa durée de vie et à la capacité offerte est particulièrement élevé avec un rapport de 1 à 3 par rapport aux dernières acquisitions de tramway classique en Ile de France.

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Clamart - Route du Pavé Blanc - 15 novembre 2014 - Insertion du T6 et de sa faible largeur sur une voirie étroite marquée par le besoin d'une desserte locale due à la présence de plusieurs commerces. La chaussée a été réduite à une seule voie. On notera évidemment que le Translohr roule sur une piste bétonnée. La verdure sur T6 est à trouver ailleurs que sur la voie... © transportparis

En outre, en exploitation, un tramway classique aurait assuré le même débit horaire avec une fréquence moindre (5 min au lieu de 3 min 30) offrant plus de souplesses pour développer l’offre en cas d’augmentation du trafic, sans pour autant être bloqué par le seuil limite de capacité des carrefours à maintenir un niveau satisfaisant de priorité aux carrefours. Evalué sur la durée de vie du matériel, ce surcoût équivaut au coût du prolongement de T6 au moins à la Porte d’Orléans. Mais qui s'en est soucié ?

Notre dossier Translohr : quelles conséquences ?

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