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transportparis - Le webmagazine des transports parisiens

2025 : quelles énergies pour les autobus de la RATP ?

La RATP, meneur naturel ?

Avec un peu plus de 4500 véhicules, la RATP gère le plus important parc d’autobus de France détenu par un même opérateur. En 2016, 94% de ce parc fonctionne au Diesel. La RATP s’était alors fixée l’objectif de passer au tout électrique en une décennie. Un objectif très ambitieux qui ne manque pas d’interroger, sur la capacité réelle de l’opérateur à accomplir cette mutation, des industriels à fournir un parc en nombre suffisant dans les délais annoncés, sur le modèle économique, mais aussi sur l’effet d’entraînement qu’aurait ce choix stratégique sur les autres réseaux. C’est, toutes proportions gardées, une logique similaire à celle qui a prévalu tant dans les années 1920-1930 pour démanteler les tramways que dans les années 1960 pour aboutir à l’autobus standard.

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Ci-dessus, les derniers représentants des autobus Diesel de la RATP. De haut en bas, un MAN Lion's City sur la ligne 207, vu place Pierre Sémard à Villiers-sur-Marne (le 16 juillet 2013), un Mercedes Citaro C2 articulé sur la ligne 304 rue Gabriel Péri à Colombes (le 1er mai 2016) et un Iveco Urbanway 12 au Champ de Mars (le 27 avril 2016). © transportparis

Pour autant, Transdev et Keolis gèrent, au plan national mais aussi en Ile-de-France, des flottes considérables d’autobus, mais les logiques sont morcelées selon les différents réseaux. Les deux groupes peuvent-ils avoir une stratégie nationale pouvant être déclinée sur l’ensemble des réseaux dont ils sont délégataires ? L’autobus hybride fait son apparition sur les réseaux Optile, où le GNV était également présent de façon très variable selon les réseaux et les opérateurs. La percée du véhicule électrique en grande couronne reste limitée car les besoins de performance sont plus importants et l'autonomie de ces motorisations reste encore limitée, tout juste équivalente à une journée de service d'un autobus Diesel classique.

Hybride et GNV : des choix de transition ?

En l’état actuel du marché, l’autobus électrique est cher : très cher même puisque le prix d’achat varie du simple au double. Suite à la décision du STIF – non sans quelques agitations politiques – de ne plus commander d’autobus Diesel, la RATP s’est tourné vers les autobus hybrides. D’après la RATP, le surcoût d’acquisition – de l’ordre de 50 à 60% - n’est pas compensé par les économies de carburant, quel que soit le cours du pétrole. Ceci dit, la comparaison économique est difficile à mener sans expérience concrète. Néanmoins, on ne peut passer sous silence le rejet rapide de la solution hybride à Lyon, après quelques essais.

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Paris - Place Gabriel Péri - 27 mai 2016 - A cette date, c'était un peu le grand écart : les Lion's City de MAN en version hybrides faisaient leurs débuts sur la ligne 21 tandis que des Agora articulés de première génération étaient encore en service sur la ligne 27, comme ici la 4510 mise en service en octobre 1999. © transportparis

L'autobus hybride n'apparait donc que comme une transition, mais avec l'acquisition de 900 véhicules pour la seule RATP, l'autorité organisatrice a tenté un pari qui ne semble pas être couronné de succès. La RATP n'a pas constaté de diminution du coût d'acquisition en sortant cette technologie du statut de niche, et les résultats écononomiques sur la consommation de carburant et le coût de possession du véhicule, sont très décevants. Conséquence, au printemps 2018, Ile-de-France Mobilités a décidé d'arrêter les commandes d'autobus hybrides... après avoir passé commande d'un millier de véhicules.

Le STIF et la RATP ont également décidé de relancer la filière des motorisations au gaz en engageant la généralisation de cette énergie sur le dépôt de Créteil déja équipé. Compte tenu des contraintes d’installation des équipements dans les dépôts et surtout vis-à-vis de leur entourage, cette solution sera assurément cantonnée à la banlieue. En 2020, les premiers bus fonctionnant au biogaz sont apparus au dépôt de Massy.

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Paris - Place Gabriel Péri - 4 juin 2016 - La relance de l'autobus au GNV a commencé avec l'arrivée de Lion's City sur la ligne 24, dans le cadre de la généralisation de l"équipement du dépôt de Créteil. MAN a d'ailleurs largement percé dans les effectifs de la RATP. © transportparis

Autobus électrique : des espoirs... mais des réalités tenaces

Dans la première mouture de son plan, la RATP fondait de grands espoirs sur la traction électrique. Celle-ci permet, il est vrai, d'allonger la durée de vie de ces autobus électriques par rapport aux hybrides et aux Diesel, par l’absence de transmission : les trolleybus (qui ont existé en région parisienne) ont une durée de vie de l’ordre de 25 ans. Si l’autobus électrique y parvenait, il y aurait donc de notables économies pour les opérateurs du fait du ralentissement du rythme de renouvellement de la flotte.

Dans un premier temps, la RATP a souhaité tester l'autobus électrique sur une ligne servant à la fois de démonstrateur et de terrain d'études grandeur nature : la ligne 341 Porte de Clignancourt – Mairie de Clichy – Etoile avec les Bluebus de Bolloré, offrant une capacité similaire aux Lion’s City (production MAN) prédécemment engagés : 23 autobus ont été commandés et les premiers exemplaires ont été mis en service en juin 2016. L'expérience a été élargie à d'autres lignes de Paris (29, 69, 72) et de banlieue (115 et 126), puis un marché-cadre de 1000 véhicules, a été lancé, dans le but de réduire les coûts unitaires. Cependant, le résultat de la procédure limita le marché à 800 véhicules produits par Bolloré, Heuliez et Alstom. Le rythme réel des livraisons, l'arrêt d'exploitation de la deuxième génération de Bluebus (Bolloré) suite à des incendies révélant des lacunes sécuritaires et l'abandon de la production de l'Aptis chez Alstom. Heuliez a donc tiré son épingle du jeu avec le GX337. Néanmoins, atteindre 80 % de bus électriques en 2025 est devenu de fait illusoire.

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Clichy-la-Garenne - 17 février 2017 - La ligne 341 a donc servi de laboratoire pour l'autobus électrique à la RATP avec des véhicules d'un nouveau constructeur, émanation d'un empire industriel protéiforme. Les premiers Bluebus portaient la livrée mariant les couleurs de la RATP et du STIF. © transportparis

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Paris - Rue de Belleville - 20 août 2021 - La deuxième génération du Bluebus dispose d'une caisse plus haute, moins élégante, mais avec 3 portes avec la livrée de l'autorité organisatrice. Suite à deux incendies, 149 véhicules sont frappés d'une interdiction de circulation nationale... et l'issue de la crise reste incertaine. © transportparis

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Paris - Boulevard Magenta - 4 octobre 2021 - Etrange autobus que l'Aptis d'Alstom produit par la filiale New Translohr. Devant l'échec commercial de ce modèle, il a été retiré du catalogue. La RATP en dispose de 50, peu commodes car d'une capacité limitée malgré leur longueur similaire à celle des autres modèles. © transportparis

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Arcueil - Carrefour de la Vache Noire - 7 novembre 2021 - L'autobus électrique ne se limite pas à Paris : en atteste ce GX337 sur la ligne 188 en direction de Bagneux. © transportparis

Les acquisitions portant uniquement sur des autobus standards, le choix s'est porté sur des véhicules à charge lente nocturne au dépôt, nécessitant d'importants investissements pour adapter les installations, le dimensionnement de l'alimentation électrique et transformer les métiers de la maintenance puisque le dieseliste doit se muer en électricien. Autre enjeu : les batteries. Il y a bien sûr la question de leur performance, de leur durée de vie, mais aussi le choix économique de la location ou de l'acquisition.

Enfin, il faut remarquer que les autobus électriques sont plus lourds que leurs homologues thermiques, imposant une chasse aux kilos. La masse étant en partie en toiture, la structure des véhicules conçus pour des motorisations classiques avec une autre répartition des forces, tiendra-t-elle dans la durée ?

A ce stade, l'utilisation d'autobus avec recharge en cours de parcours n'est pas envisagée à grande échelle : avec moins de batteries, donc moins de poids, ces véhicules supposent cependant de pouvoir accoster précisément sous les bornes de recharge. C'est souvent une gageure !

Abandon des hybrides, relance du gaz

En 2020, changement de posture côté Ile-de-France Mobilités : manifestement, les résultats moyens du premier appel d'offres (1000 bus annoncés et finalement un marché oscillant entre 780 et 800 véhicules) n'ont pas permis de faire accoster le coût unitaire au résultat espéré. Il faut aussi ajouter que la contraction des moyens avec l'effet de la pandémie, remet en question le modèle économique des transports publics et la capacité d'investissement. Pour autant, l'objectif de décarbonation reste entier.

Ainsi, aux côtés du millier de bus hybrides déjà livré, l'autobus électrique ne devrait plus constituer 80 % du parc de la RATP mais seulement 30%, avec une perspective de 1500 autobus, par le biais d'un nouveau marché en 2021. Les bus au biogaz devraient prendre la relève avec la perspective de 2200 véhicules d'ici 2025.

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D'un coût intermédiaire entre l'autobus Diesel classique et les motorisations hybrides, cette solution est bien plus économique que les véhicules électriques à batteries, sans poser de questions sur l'autonomie de service. Cependant, son avenir dépend des décisions européennes relatives à l'interdiction de commercialisation de véhicules à moteur thermique au-delà de 2035 : pour l'instant, elle ne concerne que les véhicules particuliers.

Qui plus est, si l'utilisation d'hydrogène dans une pile à combustible semble ne procurer qu'un résultat moyen, les recherches industrielles sur son utilisation à l'état gazeux ou liquide dans des moteurs thermique pourrait aussi constituer une issue à moyen terme.

Enfin, l'autobus électrique à batteries semble au milieu du gué : la performance des batteries peut encore progresser, mais à quel coût et avec quelles conséquences de fond sur la stratégie industrielle quant à leurs matériaux constitutifs de ces équipement ? La réorientation en faveur des véhicules thermique au gaz semble une position de repli stratégique face à des incertitudes techniques et économiques.

Il en est d'ailleurs de même plus largement en Ile-de-France où les véhicules électriques demeurent en nombre relativement restreint : plus on s'éloigne de Paris, plus les motorisations thermiques résistent, en particulier avec le recours au biogaz.

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Paris - Rue de Rennes - 15 septembre 2023 - MAN poursuit sa forte percée en Ile-de-France avec la nouvelle génération de Lion's City motorisés au biométhane. On note que la livrée s'assombrit encore avec une dose de noir encore plus importante. © transportparis

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Villiers-sur-Marne - Rue du chemin de fer - 17 novembre 2022 - Solaris a réussi à placer une version au gaz naturel de son Urbino articulé : pour l'instant, Ile-de-France Mobilités ne passe pas à la traction électrique sur les bus de 18 m. © transportparis

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Massy - Avenue Raymond Aron - 9 décembre 2023 - La poussée des autobus au gaz vient clairement compenser la réduction de voilure sur les véhicules à batteries. Iveco livre une nouvelle déclinaison de l'Urbanway. © transportparis

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Nanterre - Rue de Stalingrad - 25 avril 2022 - Le dépôt de Nanterre fait partie des nouveaux sites adaptés pour les motorisations au gaz. Ce GX337 habituellement engagé sur les lignes 241, 244 et 259 circule ici sur la ligne 160 en direction de Boulogne. Le Mont Valérien aurait pourtant été un secteur propice aux véhicules électriques. © transportparis

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