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transportparis - Le webmagazine des transports parisiens

MI79 et MI84, les trains de l'interconnexion

Les premiers matériels du RER (Z ligne de Sceaux et MS61) étaient dédiées à l'exploitation sur les lignes de la RATP. L'adoption pour le RER B du principe de l'interconnexion de la ligne de Sceaux, exploitée par la RATP, et de la banlieue Aulnay de Paris Nord, sous l'égide de la SNCF, allait constituer l'aboutissement d'un schéma élaboré à la fin des années 1920 par Paul Langevin, le ministre des travaux publics d'alors. Il a nécessité le développement d'un nouveau matériel adapté au service à fort trafic et compatible avec les deux réseaux.

Dans ce contexte, les deux exploitants avaient lancé un appel d'offres commun pour la fourniture d'automotrices RER pour le service de la ligne B, portant sur 119 rames dont 68 à la RATP et 51 à la SNCF. Ainsi naissait le MI79.

Caractéristiques du MI79

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Lozère - 12 août 1984 - Rutilante rame MI79, en unité simple sur la section sud du RER B. Jusqu'en 1987, la cohabitation avec les Z ligne de Sceaux donnait lieu à un choc des générations ! © M. Van der Velden

Habituellement, à la RATP, la désignation du matériel retient l'année de lancement du marché. Le MI79 est une des exceptions (avec le MF67 qui devrait s'appeler MF65) : le contrat destiné à la conception et à la constuction de rames aptes à circuler sur la ligne de Sceaux et le réseau SNCF a été signé le 29 juillet 1976 par la Société Franco-Belge, CEM-Oerlikon, ANF et deux deux opérateurs.

Le MI79 - désigné Z8100 à la SNCF - est de conception entièrement nouvelle, même si on peut trouver quelques cousinages avec les Z6400 côté SNCF. Cette automotrice à 4 caisses dont 2 motorisées est destinée à desservir des quais de 1,15 m en zone RATP, en courbe de faible rayon dans plusieurs gares, et à 55 cm en zone SNCF, imposant un emmarchement mobile changeant de position entre La Plaine et Gare du Nord.

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Le Bourget - 1er août 1981 - Les premiers MI79 ont évidemment été engagés avant l'interconnexion : au nord, ils ont repris les dessertes Roissyrail confiées aux Z6400 et les services de banlieue plus conventionnés en Z6100 et en RIB. (archives SNCF)

Le MI79 est plutôt bien motorisé car assez léger du fait de sa caisse en aluminium : 23 secondes pour dégager un quai de 208 m et une vitesse maximale théoriquement atteinte en 100 secondes.

A l'intérieur, les banquettes sont bien rembourrées et les voyageurs disposent même de porte-bagages dans les deux classes. Si les assises alternent entre le bleu et le rouge, les couleurs régionales, l'habillage intérieur est très inspiré des choix de la SNCF : comme dans les automotrices Z2 destinées aux omnibus et express, crème au plafond, jaune sur les parois et bleu nuit en extrémité de caisses, où, pour la première fois en région parisienne, les voyageurs peuvent passer d'une voiture à l'autre grâce aux portes d'intercirculation.

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Aménagement intérieur d'un MI79 d'origine : sièges en texoïd et main courante basse en plateforme, qui ne sont plus présentes que sur les rames de la SNCF, la RATP les ayant remplacés par une simple barre verticale. © transportparis

Mise en service et exploitation du MI79

La livraison de ce matériel s'est principalement déroulée entre 1980 et 1983 pour la mise en oeuvre de l'interconnexion. Cependant, les premières années ont été émaillées de difficultés liées à l'apparition sur des matériels de banlieue de l'électronique de puissance à thyristors, et d'une certaine sensibilité au gel et à la neige de sa chaîne de traction. Leur arrivée permet toutefois de muter les MS61 vers la ligne A et d'entamer la réforme des automotrices Z.

Néanmoins, les difficultés rencontrées sur la ligne A à partir de 1983, avec la surcharge et la surexploitation des MS61 conduirent la RATP à stopper la réforme du matériel ancien et à muter temporairement 24 MI79 sur la ligne A, retardant la poursuite de l'interconnexion qui débute avec 8 puis 12 trains par heure.

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Bourg la Reine - 7 avril 2005 - La livrée tricolore Ile-de-France est apparue avec le MI79. Initialement, elle devait n'être appliquée qu'aux matériels des lignes de RER. Elle finalement été appliquée par la SNCF à la plupart de son matériel au cours des années 1990. © transportparis

MI84 : un MI79 simplifié pour le RER A

En prélude à l'interconnexion du RER A vers Cergy et Poissy, la RATP passa commande de 73 rames type MI84 constituant une version simplifiée du MI79 : suppression des porte-bagages et de l'éclairage pour modifier le circuit de ventilation, abandon des banquettes rembourrées pour des sièges anti-lacération, suppression de l'intercirculation, révision de la chaîne de traction...

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Livrées à la suite des MI79, les premiers MI84 ont fait leurs débuts en mars 1984. autorisant le recours progressif des MI79 sur leur ligne d'affectation, même si la rudesse des hivers 1985-1986 et 1986-1987 (jusqu'à -15°C l'après-midi dans Paris) imposa un nouveau décalage dans la réforme des 8 dernières rames Z, souvent applaudies à leur arrivée en gare malgré leur surcharge extrême.

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Houilles Carrières sur Seine - 27 juin 2011 - Les MI84 ont permis l'intégration des dessertes de Cergy et de Poissy au RER A en 1988-1989. Cette nouvelle version, légèrement simpliée, s'est cependant avérée mal adaptée sur cette ligne en raison de sa capacité insuffisante, notamment par une longueur de 208 m en UM2 pour des quais de 225 m. © transportparis

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Paris Auber - 12 janvier 2014 - Très rapidement, les 208 m des compositions MI84 ont été décriées sur le RER A : en perdant 16 m de longueur utile, ces rames se révélèrent rapidement insuffisamment capacitaires. Il fut un temps envisagé d'ajouter une caisse pour utiliser les 225 m des quais mais cette solution aurait dégradé les performances du matériel et compliqué la gestion d'un parc avec des éléments de 4 caisses et d'autres de 5 caisses. © transportparis

A compter de février 1987, grâce aux MI84, la desserte du RER B fut totalement interconnectée avec 20 trains par heure. La desserte évoluait peu, alors que le trafic augmente régulièrement, et de façon très soutenue à partir de la fin des années 1990, par l'urbanisation sans cesse croissante des banlieue nord et sud, et surtout au début des années 2000 avec l'essor du quartier de La Plaine à Saint-Denis, dotée d'une nouvelle gare plus fonctionnelle, et surtout plus proche du Stade de France inauguré en 1998.

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Robinson - 24 mars 2012 - L'image classique de la ligne de Sceaux et de son matériel MI79 assurant le service depuis les années 1980. Tout au plus, les tags sur les rames et les panneaux de desserte concourent à la datation de la photo. © transportparis

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La Garenne - Colombes - 7 mai 2011 - Les ruptures d'interconnexion sur le RER A se traduisaient avec les MI84 par une déviation entre Sartrouville et Paris Saint-Lazare, avec un unique arrêt intermédiaire à La Garenne - Colombes. Une modalité disparue avec la généralisation des MI2N et MI09 trop longs et aux accès trop hauts pour les quais accessibles depuis les voies du groupe V. © transportparis

Les points faibles

Outre la longueur de rame insuffisante pour le RER A et leur allergie à l'hiver, les MI79 et MI84 ont rapidement mis en avant leurs limites :

  • les caisses plus longues sont plus étroites que les matériels antérieurs (MS61 et Z6400) ce qui se répercute sur la largeur des couloirs ;
  • les lacunes horizontales provoquées dans les gares en courbe de faible rayon au sud du RER B ;
  • les lacunes verticales malgré l'emmarchement intermédiaire au nord du RER B, mais pour le coup, la responsabilité incombe plutôt à l'infrastructure ;
  • les strapontins situés sur les plateformes, réduisant des deux tiers la largeur d'entrée et de sortie quand les voyageurs les utilisent même en cas d'affluence, mais c'est plutôt une responsabilité individuelle, en dépit de la tentation que représente leur présence ;
  • l'absence de freinage électrique sous 25 000 V

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Bures-sur-Yvette - 15 juillet 2008 - L'une des gares en courbe prononcée sur la ligne B. En direction de Paris, la rame n'est accessible qu'en franchissant un vide important entre le quai et la rame aux caisses effilées. © transportparis

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Sur un quai à 55 cm, l'accès aux MI79 n'est pas des plus aisés : le rehaussement des quais sur la partie nord du RER B s'imposait avec évidence... mais il fallut quand même attendre 30 ans ! © transportparis

Modernisation de la ligne B et des MI79

Au milieu des années 2000, pour compléter le parc, la RATP affecta d'abord 8 rames MI84, libérées par l'arrivée des MI2N sur la ligne A. En prélude à la nouvelle desserte RER B Nord+ adoptée en 2007, 6 rames supplémentaires furent mutées, devant dans un premier temps couvrir les besoins de rénovation des MI79, dont l'effectif avait été ramené à 118 éléments suite aux attentats de 1995-1996, pour un montant de 250 M€.

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Robinson - 15 septembre 2018 - MI79 rénové et MI84 côte à côte. La face avant très sombre du premier peut interroger quant à la visibilité du train pour le personnel intervenant sur les voies. © transportparis

Le programme de rénovation était ambitieux : pour les voyageurs, le renouvellement complet des aménagements intérieur a été l'opération la plus visible, avec l'adoption de tons clairs sur les parois, de nouveaux sièges gris et vert anis, l'installation de la ventilation réfrigérée, de la vidéo-surveillance et d'annonces sonores et lumineuses. Les porte-bagages au plafond ont été remplacés par des racks au sol, plus commodes, et les strapontins supprimés au profit de miséricordes n'obstruant pas le passage et contribuant ainsi à consacrer la pleine largeur des portes à la fonction d'échanges de voyageurs en station.

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Intérieur d'un MI79 rénové : couleur claire sur les parois, plus sombres sur les sièges, nouvel éclairage et présence d'un rack à bagage sur la plateforme. © transportparis

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Lozère - 25 janvier 2014 - La nouvelle livrée des rames rénovées allie le gris métallisé voulu par le STIF, le vert jade de la RATP et le carmillon de la SNCF. Néanmoins, le coup de jeune a été salutaire, même s'il a été tardif. © transportparis

Pour la technique, la rénovation intègra de nouveaux composants électroniques sur la chaîne de traction et l'installation du KCVB pour la signalisation en cabine sur les voies Bis désormais dédiées au RER B entre Paris et Mitry. La rénovation a été assurée par les ateliers de Sucy de la RATP, puis par ACC pour le parc de la Régie et par les ateliers de Nevers pour les rames de la SNCF.

Or la rénovation s'est heurtée d'une part à la complexité native du MI79, aux nombreuses modifications apportées au fil de l'eau lors de sa phase de fiabilisation, à la délicatesse de sa structure de caisse légère, mais aussi aux difficultés industrielles : la défaillance de l'un des équipementiers fournissant les parois intérieures a causé d'importants retards, de même que la conformité de ces kits de rénovation. Pour ajouter à la difficulté, des soupçons de fibres d'amiante ont conduit à retirer les premières rames rénovées du service et à reprendre l'intégralité du parc pour procéder à des mesures particulièrement sévères d'examen pour évaluer le risque par rapport aux personnels et aux voyageurs et conduisant in fine à la reprise de l'exploitation et de la rénovation avec un lourd processus de désamiantage.

En compensation, la RATP a profité de l'arrivée des MI09 sur le RER A pour envoyer un contingent supplémentaire de 25 MI84, portant à 39 l'effectif sur le RER B

MI84 : une carrière écourtée, sans regrets

La fréquentation grandissante du RER A et les problèmes récurrents d'exploitation mirent en lumière l'insuffisante capacité des MI84 du fait de la longueur de 208 m, rendant 200 places aux compositions de 3 MS61. La crise d'exploitation prit un tournant politique. Ainsi naquit le MI09.

L'effectif du RER B fut porté à 34 rames constatant la baisse de la fiabilité des MI79 et pour intégrer quelques adaptations de la desserte, notamment au sud. Leur rénovation fut engagée très - trop - tardivement, tout comme celle de leurs aînés, ce qui n'est pas étranger aux problèmes industriels rencontrés, sans compter les multiples adaptations à la marge de leur structure pour les fiabiliser à leurs origines. Résultat, la fin du processus devrait coïncider avec l'arrivée du MI20 : aussi, en 2023, a été décidé d'alléger le programme pour limiter les frais, à tous les sens du terme !

Qui plus est, MI79 et MI84 font une nouvelle fois preuve de leurs limites en matière de capacité sur le RER B, dont la fréquentation a augmenté d'un tiers entre 2000 et 2020 pour approcher le million de voyageurs quotidiens, avec seulement 20 trains par heure et par sens en théorie et seulement 18 en pratique. Autant dire que la situation connue au début des années 2000 sur le RER A était presque moins tendue !

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La Plaine Stade de France - 22 août 2023 - Ambiance vintage possible sur le RER B puisqu'avec les MI84 non rénovées, on peut voyager dans une ambiance typique des années 1980. Cette gare est devenue un point stratégique de la ligne compte tenu du stade mais aussi des nombreux sièges d'entreprise installés dans le secteur, dont ceux du groupe SNCF. Même avec l'essor du télétravail, l'exploitation reste très tendue. © transportparis

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Châtelet les Halles - 10 juin 2019 - Le RER dans son domaine de prédilection. La livrée extérieure sombre des MI79 rénovés n'égaie pas la triste décoration appliquée à la rénovation de la gare centrale du RER. © transportparis

Pour esquisser le portrait-robot du successeur du MI79 et du MI84, les données d'entrée sont les suivantes :

  • longueur maximale en unité multiple : 208 m ;
  • hauteur des quais : 920 mm minimum, 1150 mm maximum ;
  • capacité : 2000 places en UM2, 4 voyageurs debout par m² ;
  • compatibilité avec la desserte de quais en courbe de 200 m de rayon, exerçant une très forte contrainte sur l'emplacement des portes ;
  • évidemment des performances en accélérations et freinage au moins équivalentes à celles du matériel remplacé ;
  • compatibilité avec NExTEO pour le pilotage automatique sur le tronçon central.

L'analyse de transportparis avait conduit à envisager une rame de 6 caisses pour 104 m de long, avec 4 caisses centrales de 16,5 m et 2 caisses extrêmes de 19 m, mais plutôt avec une configuration à un seul niveau avec 2 portes par face. La plus grande longueur des caisses extrêmes pourrait peut-être autoriser leur aménagement à 2 niveaux. L'architecture à 6 voitures disposerait donc de 12 portes, et celle à 5 voitures pourrait n'en avoir que 10 ou 12 avec une porte supplémentaire sur les caisses à un niveau.

La solution retenue par le groupement CAF - Bombardier (avant la reprise de ce dernier par Alstom) est une rame de 7 caisses dont 3 à deux niveaux, comprenant toutes 2 portes par face, et baptisée MI20.

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Arcueil-Cachan - 27 juin 2011 - Un MI79 passant sous l'acqueduc de la Vanne, l'un des ouvrages destiné à l'acheminement en eau potable de la capitale. Un cliché de la ligne de Sceaux... et un ouvrage qui attend la nouvelle génération de matériel roulant... © transportparis

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