Canalblog
Editer la page Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
transportparis - Le webmagazine des transports parisiens

RERng : une réponse aux nouveaux défis de la zone dense ?

Confirmé en janvier 2017, le groupement Alstom-Bombardier est chargé de la construction du RERng destiné aux RER D et RER E. Ce matériel doit, pour la SNCF, incarner la transformation de l'exploitation en Ile-de-France.

Jusqu'à présent, les matériels roulants de la SNCF conçus par ses soins et engagés sur des lignes de RER n'ont pas vraiment répondu aux spécificités de l'exploitation à haut débit et forte affluence. Les Z2N favorisent la capacité assise au détriment de la circulation dans la rame et de la rapidité des échanges. Bien que conçue avec la RATP, comme ce fut le cas pour le MI79, la version SNCF du MI2N se distingue par une sous-motorisation, avec une motrice de moins.

A l'origine : les besoins du projet EOLE

Le RERng vient d'abord répondre aux besoins du prolongement du RER E vers Mantes-la-Jolie, nécessitant un nouveau matériel aux performances élevées pour :

  • franchir la rampe de 37 ‰ entre La Défense et Nanterre La Folie en dégageant le plus rapidement la gare de La Défense qui ne comprend que 2 voies du fait de son insertion au chausse-pied sous le CNIT ;
  • proposer les meilleures performances sur le groupe V du fait d'une desserte à 6 trains par heure jusqu'à Mantes (contre 3 actuellement) de sorte à réduire au maximum l'impact sur les sillons Paris - Normandie.

Au-delà de cette vocaion, qui peut être assimilée au remplacement des VB2N et BB27300 sur le groupe V, vient le cas des 53 MI2N du RER E actuel. Compte tenu de leur incapacité à répondre aux objectifs précédemment énoncés, leur remplacement s'imposait logiquement.

210516_27340villennes3

Villennes-sur-Seine - 21 mai 2016 - Les VB2N, livrées à partir de 1975, arrivent en fin de carrière : le prolongement du RER E et la stratégie d'acquisition du RERng intègrent cette fonction. © transportparis

170315_MI2Nemerainville1

Emerainville Pontault-Combault - 17 mars 2015 - Que faire des MI2N du RER E ? Il fut un temps envisagé de retirer leur remorque centrale et de les engager sur le groupe III en remplacement des Z6400. Il aurait fallu pour cela que les calendriers du projet EOLE et du RERng coïncident avec la fin de vie de la dernière génération d'automotrices en acier inoxydable. Le devenir de ces rames est donc la réforme. © transportparis

Un outil au service du RER D

Outre les besoins du RER E, représentant un peu plus de 120 rames, l'introduction d'un matériel roulant plus performant et vraiment taillé pour l'exploitation en zone dense est apparue plus que souhaitable sur le RER D : non pas que cette ligne desserve beaucoup de gares dans Paris, mais l'amélioration de l'insertion dans le tunnel Châtelet - Gare du Nord est déjà une raison suffisante. Qui plus est, en libérant des Z2N série 20500 ayant encore un potentiel résiduel relativement important, il serait possible de les muter - après raccourcissement à 4 caisses - sur le RER C afin de remplacer leurs aînées série 5600 et 8800.

Sujet particulièrement sensible en Ile-de-France, la hauteur des quais sur le RER E a été définie à 920 mm : c'est le cas des gares des branches de Chelles et de Tournan. Les gares souterraines parisiennes ont été initialement dotées de quais de 1150 mm pour proposer un accès de plain-pied depuis les MI2N définies sur l'interface quai-train du RER A... et avec ses performances, imposant des roues de grand diamètre (965 mm).

Il fallait donc en faire de même sur le RER D, justifiant un programe d'investissement de rehaussement des quais sur cette ligne, mais au préalable un reformatage de la ligne, destiné aussi à améliorer sa régularité. En décembre 2018, les branches de Malesherbes et de Melun via la vallée de la Seine ont été déconnectées, limitées à Juvisy. Devenant une desserte de grande couronne, elles ont bénéficié de l'introduction des Régio2N, comme sur la ligne R : un matériel à plancher bas (plateformes à 600 mm) évitant le rehaussement des quais... tout en procurant un accès direct aux trains.

140221_20880maisons-alfort

Maisons-Alfort - 14 février 2021 - Les quais de la gare ont été rehaussés, les abris rénovés et agrandis, car ils incitent les voyageurs à se répartir sur une plus grande longueur et participent donc à l'amélioration des conditions de montée et de descente. © transportparis

Une procédure appel d'offres hors normes

D'un montant total de 3,75 MM€, le marché RERng comprend donc 255 rames dont 130 pour le RER D et 125 pour le RER E. La tranche ferme de 71 rames aboutit un coût par élément de 21,83 M€ dont 15,5 M€ pour la part variable (liée à la série) et 6,3 M€ de frais fixes (ingénierie de conception, chaîne de montage...). Une tranche conditionnelle d'un peu plus de 100 rames, en plus des 255, permettrait de couvrir des besoins à plus long terme :

  • schéma directeur RER E à l'est : troisième mission Gagny sur la branche de Chelles, prolongement à Roissy-en-Brie des missions Villiers-sur-Marne, troisième mission Val de Fontenay ou Nogent - Le Perreux ;
  • EOLE à l'ouest après LNPN : passage de 6 à 8 trains par heure jusqu'à Mantes, ajout d'une troisième mission (probablement jusqu'aux Mureaux) ;
  • schéma directeur RER D : passage à 16 trains par heure jusqu'au Stade de France après équipement NExTEO de la section Stade de France - Villeneuve-Saint-Georges (et par conséquent du tronc commun du RER B).

A l'épuisement de la tranche optionnelle, le coût unitaire du RERng devrait accoster à 14,7 M€ aux conditions économiques de référence du marché.

L'appel d'offres a suscité plusieurs convoitises à commencer évidemment par celle d'Alstom et Bombardier, candidats incontournables dans le paysage ferroviaire français. Comme pour le MI2N et le MI09, ils ont rapidement décidé de faire cause commune Siemens et CAF ont également participé à la compétition. Siemens se distingua d'emblée par une architecture avec voitures d'extrémité à un seul niveau (comme les Desiro Haute Capacité développés pour Rhein-Ruhr Xpress), finalement reprise par Alstom-Bombardier : seule CAF tenta une solution totalement à deux niveaux. Côté SNCF, on hésita longtemps sur la demande d'une version de 94 m pour le réseau Saint-Lazare, très hypothétique.

Un train principalement à deux niveaux

Le RERng est donc un train majoritairement à deux niveaux, mais pas totalement puisque les voitures d'extrémité sont à un seul niveau. Le développement d'un nouveau matériel était nécessaire. Une architecture comme celle du MI09 était intrinsèquement impossible : il est conçu pour des quais de 1,15 m de haut, avec des roues motrices de 965 mm de diamètre, de fait incompatible avec un accès de plain-pied depuis des quais de 920 mm. Pour ce faire, il faut des roues de plus petit diamètre, 840 mm comme sur le Francilien, ce qui impose aussi des caisses plus courtes pour respecter la charge à l'essieu... et donc à 2 portes, car sur 18 m de long, loger 3 portes n'est pas possible sur une voiture à 2 niveaux.

Avantage du principe de la caisse de 18 m de long, sur la base d'une version 112 m à 6 caisses pour le RER E (4 voitures centrales de 18 m et 2 voitures d'extrémité de 20 m), il était facile de faire une version à 7 caisses de 130 m pour le RER D... voire une version à 5 caisses de 94 m s'il fallait développer une version Saint-Lazare.

Pour le RER D, il en résulte un gain de 4 portes (10 sur une Z2N 5 caisses, 14 sur un RERng 7 caisses), ce qui n'est pas négligeable quand on cherche à améliorer les échanges !

Les caisses d'extrémité à un seul nivau sont aussi la conséquence de la mise en conformité avec les normes d'accessibilité, et de la nécessité de disposer de suffisamment d'espace pour loger l'ensemble des équipements de la rame, qui ont du mal à trouver place dans les caisses à 2 niveaux devant accueillir un maximum de places assises.

RERng

Des aménagements différenciés

Le RERng proposera 3 espaces distincts : les intercirculations, encadrées par 2 portes, proposeront une configuration très urbaine pour les petits trajets (type Haussmann - La Défense). Les salles hautes seront configurées pour les longs trajets (type Tournan - Magenta) et les salles basses sur des trajets intermédiaires (type Magenta - Poissy).

RERng_2

Les intercirculations seront aménagées de façon non seulement à accélérer les échanges de voyageurs, mais aussi à offrir une capacité maximale pour les petits trajets. (Document Alstom)

151123_interieur-RERNG-voiture-extremite

151123_interieur-RERNG-salle-basse

151123_interieur-RERNG-salle-haute1

Trois vues des différents espaces du RERng. D'abord la voiture d'extrémité, à un seul niveau et configurée en 2+2, avec un couloir large de 1,05 m, contre 89 cm pour la référence que fut le MS61. C'est toutefois la voiture la plus bruyante de la rame en raison d'une soufflerie de climatisation assez présente. Ensuite, la salle basse, avec des carrés de 6 places d'un côté et un alignement de strpontins de l'autre. Enfin la salle haute en 3+2 à peu près conventionnel avec une assise relevable pour chaque carré de 6 places. Le confort des sièges est en retrait par rapport aux Franciliens. Le séparateur entre les sièges est d'utilité discutable car il n'a pas l'effet d'un accoudoir. La décoration des sièges reprend le principe du mélange des couleurs apparu sur le Francilien, mais l'éclairage est un peu moins travaillé que dans ces dernières. © transportparis

RERng : un train hautes performances ?

151123_58023magenta8

Paris - Magenta - 15 novembre 2023 - Premiers jours d'exploitation sur la seule branche de Chelles et en heures creuses. Le RERng bénéficie d'un effet de nouveauté auprès du public, qui fait évidemment très bien la différence avec des MI2N défraichis et des Franciliens agréables mais pas toujours assez capacitaires. © transportparis

151123_58023rosa-parks4

Paris - Rosa Parks - 15 novembre 2023 - L'esthétique frontale du RERng est un peu particulière avec une forte présence du noir et un liseré bleu, couleur de l'autorité organisatrice qui renforce cette impression. © transportparis

Au niveau des performances, le RERng doit dégager un quai de 225 m en 23 secondes, c'est à dire à l'égal du MI84 pourtant plus court de 17 m, et surtout beaucoup plus léger. L'amélioration des performances est très nette, de près de 50 % par rapport aux 11,1 kW / t du MI2N SNCF, et d'un tiers pour une Z20500 à 5 caisses longues qui plafonne à 10,58 kW / t. En espérant que la conduite tire profit de ces aptitudes...

Le RERng est prédisposé pour recevoir NExTEO, le système de pilotage automatique qui équipera le RER E entre Pantin et Nanterre, le RER D entre Villeneuve-Saint-Georges et Saint-Denis, ainsi que la totalité du RER B.

L'augmentation du débit est un enjeu central du projet RERng, fortement lié à NExTEO. La motorisation sera assurément en progrès, mais outre le coefficient d'accélération, la question du freinage peut s'avérer délicate : en renforçant l'alimentation électrique pour assurer une tension au plus proche du nominal (25 kV sur le RER E), on réduit en partie la performance du freinage électrique, la tolérance nominale des installations restant invariablement autour de 27,5 kV. Les équilibres sont parfois subtils.

Evidemment, les observateurs surveilleront de près les temps de stationnement. Sur le RER D, la généralisation des quais de 920 mm a déjà amélioré la situation mais il reste encore une lacune horizontale du fait de la marche intérieure.

A mi-novembre 2023, les commandes s'élevaient à 93 Z58000 (version 6 caisses) et à 38 Z58500 (version 7 caisses). Il faudra donc de nouvelles délibérations pour commander les rames destinées à la section Ouest du RER E et généraliser leur présence sur le RER D.

tableau-RERng

Evidemment, dans les deux cas, la capacité assise est en baisse par rapport aux matériels existants :

  • - 51 places par rapport au MI2N du RER E, mais
  • -156 places par rapport à une Z20500 5 caisses longues rénovée du RER D.

Les fortes capacités totales annoncées semblent avoir été calculées avec 6 voyageurs debout par m² sur les plateformes, au lieu de 4 habituellement. quant à la baisse de capacité assise, plusieurs explications peuvent être fournies :

  • les normes d'accessibilité, conduisant aux voitures à un seul niveau en extrémité et à modérer la pente des escaliers vers les salles hautes et basse ;
  • le pas de siège porté de 1540 mm (Z2N et MI2N) à 1650 mm selon la jurisprudence du Francilien : choix fondé sur l'augmentation de la taille des voyageurs et le meilleur usage des places centrales dans les espaces en 3+2 ;
  • notamment pour le RER D, le passage de 10 à 14 portes sur 130 m, alors que la version 112 m comprend 12 portes au lieu de 15 sur le MI2N, mais il ne faut pas oublier que la porte centrale ne donne accès qu'aux salles basses sur la version SNCF (décidément curieusement conçue...).
Publicité
Publicité
Publicité