Une étude sur le potentiel des tramways franciliens
Elle était passée sous nos radars mais un lecteur assidu de Tramways & Urban Transit nous a fait parvenir cette information du mois de septembre. Ile-de-France Mobilités a missionné TTK en septembre dernier pour une mission prospective concernant les tramways et trams-trains franciliens. Voici le communiqué sur le site de TTK :
« Face au constat de la forte disparité entre les technologies, spécifications techniques et modalités d’exploitation des différentes lignes de tramway et de tram-train en Île-de-France depuis la réintroduction de ce mode au milieu des années 1990, IDFM souhaite, dans le cadre de la mise en concurrence tramway projetée pour 2030, se doter d’un schéma directeur des infrastructures de tramway.
Plus concrètement, TTK produira un benchmark sur les limites du système tramway en France et dans le monde en termes de fréquence, capacité, franchissement de carrefours, vitesse commerciale, etc. En parallèle, un diagnostic des lignes existantes (et des extensions programmées) est réalisé afin de permettre à IDFM d’avoir un état des lieux précis de la situation actuelle, des points forts et des points faibles de chaque ligne en exploitation.
Dans un second temps, TTK mènera des réflexions afin d’établir des propositions pour l’avenir de chaque ligne, ainsi que sur plusieurs sujets transverses. »
Le propos est assez général, mais il faut comprendre dès l'introduction que l'hétérogénéité technique (longueur, largeur, type de roulement, alimentation, signalisation) a été identifiée comme une contrainte. TTK aura donc d'abord à produire en quelque sorte un audit de l'exploitation des lignes avec des propositions d'amélioration, dont on peut supposer qu'elles porteront principalement sur la régularité et l'adaptation du service à la fréquentation sur celles qui connaissent des problèmes importants de charge (T1, T2, T3 principalement). La suite de la mission est un peu plus ouverte et il n'est pas impossible que TTK propose des évolutions de consistance du réseau, mais le coeur de la mission portera bien sur la fiabilisation du service et les modalités techniques d'organisation des marchés relatifs à l'exploitation des lignes après appel d'offres.
Nos différents dossiers sur les tramways franciliens trouvent donc un écho, qu'il s'agisse de notre proposition de schéma directeur de développement du réseau ou de notre étude sur l'amélioration de l'exploitation. Une saine lecture pendant les fêtes !
Tramways : quels nouveaux projets ?
Près de 30 ans après le retour du tramway en Ile de France, le bilan reste quand même léger avec 137,4 km de lignes présentant une forte hétérogénéité :
- 7 lignes de tramways classiques totalisant dont 6 opérées par la RATP et une par Keolis, soit 92,5 km d'infrastructures ;
- 2 lignes de Translohr exploitées par la RATP, soit 20,4 km d'infrastructures ;
- 2 lignes de tram-train exploitées par le groupe SNCF, soit 24,3 km d'infrastructures.
Précisons par rapport à ce tableau que T1 va passer au gabarit 2,40 m avec rames de 32 m à la faveur des travaux de rénovation de la section Saint Denis - Noisy le Sec, en lien avec le remplacement des TFS.
En comparaison, les 1111 km du réseau historique à son apogée en 1925, ses 122 lignes, 2298 motrices, 928 remorques transportant 721 millions de voyageurs sur une année, ont été démantelés en 13 ans, soit à une moyenne de 85,46 km par an alors que le rythme moyen de (re-)construction n'est que de 4,74 km par an... soit presque quatre plus plus lentement que le rythme de construction du premier réseau, établi entre 1855 et 1925, à la vitesse de 17,1 km par an.
Petite consolation : la métropole lyonnaise dispose de 87,4 km de tramways constuits en 20 ans, soit un rythme moyen de 4,37 km par an.
Après la mise en service de T9 le 10 avril dernier, il y a tout de même plusieurs projets en cours de réalisation :
- T1 de Gennevilliers à Colombes et de Noisy le Sec au Val de Fontenay ;
- T3 de la porte d'Asnières à la porte Dauphine ;
- T10 de La Croix de Berny à Clamart ;
- T12 de Massy-Palaiseau à Evry-Courcouronnes ;
- T13 de Saint Germain en Laye à Saint Cyr l'Ecole.
En phase d'études, citons à présent :
- T1 de Colombes à Rueil-Malmaison ;
- T7 d'Athis-Mons à Juvisy ;
- T8 de Saint Denis à Paris (Rosa Parks) ;
- T10 dans Clamart jusqu'à la gare ;
- T11 d'Epinay sur Seine à Sartrouville et du Bourget à Noisy le Sec ;
- T12 de Massy-Palaiseau à Versailles-Chantiers (sur les voies actuelles de la Grande Ceinture) ;
- T13 de Saint Germain en Laye (Grande Ceinture) à Achères Ville.
La concrétisation de ces sections constitue déjà un programme conséquent, pas toujours simple, surtout pour les trams-trains portés par la SNCF. Mais au-delà ? L'approche des élections régionales devrait être en principe l'occasion de voir fleurir des idées variées... même si pour l'instant, tous les esprits sont focalisés par le Grand Paris Express.
Soyons pragmatiques et raisonnables : si on imaginait un seul nouveau par Département, quel pourrait-il être ?
- Paris : le bouclage du T3 entre le pont du Garigliano et la porte Dauphine, posant inéluctablement la question de l'exploitation avec la perspective d'un schéma en 3 arcs impliquant la création de 2 nouveaux terminus ;
- Seine et Marne : pour l'instant, pas de tramways en vue, mais des BHNS...
- Yvelines et Val d'Oise : probablement la conversion de la ligne 272 Gare d'Argenteuil - Gare de Sartrouville, faisant l'objet d'un projet de BHNS qui apparait sous-dimensionné ;
- Essonne : prolongement de T12 d'Evry-Courcouronnes à la gare de Corbeil-Essonnes ;
- Hauts de Seine : prolongement de T10 de la gare de Clamart à la porte de Saint Cloud par Issy les Moulineaux ;
- Seine Saint Denis : la conversion de la ligne 150 Porte de La Villette - Gare de Pierrefitte-Stains ;
- Val de Marne : assurément la conversion du duo TVM-393 s'imposerait haut la main.
Perspectives matériel roulant pour les tramways
Après la mise en service de T9 le 10 avril dernier, la situation des tramways en Ile de France est la suivante :
- travaux de réseaux pour les extensions de T1 vers Colombes et Noisy le Sec, ainsi que pour T3 entre la porte d'Asnières et la porte Dauphine ;
- la pose des voies a débuté dans l'hiver sur T10 ;
- l'extension de T7 d'Athis-Mons à Juvisy fait toujours l'objet d'études et de procédures administratives ;
- l'extension de T8 de Saint Denis à la gare Rosa Parks est en études ;
- l'extension de T10 dans Clamart va faire l'objet d'une première étude.
Ces opérations appellent à quelques précisions sur la stratégie de gestion du matériel roulant.
La ligne T3b de la porte d’Asnières à la porte Dauphine nécessite 9 rames supplémentaires au gabarit 44 m x 2,65 m. Elles seront obtenues en tirant une dernière fois sur le marché de 2003 prévoyant 70 rames de ce type. 63 sont déjà dans les dépôts et, avec la tolérance de 10% sur le volume initial, il est possible de commander ces rames ce qui assurera l'homogénéité du parc. Pour le tramway des Maréchaux, la question se poserait plutôt pour boucler la boucle... mais la décision est encore loin d'être prise.
Paris - Boulevard Berthier - 7 février 2021 - Un Citadis 402 de la ligne T3 : le marché a été ouvert en 2003 et sera utilisé au maximum de ses possibilités pour couvrir les besoins de la dernière extension en cours vers la porte Dauphine. Pour un bouclage complet, il faudra adapter la stratégie... © transportparis
T7 et T8 sont chacune concernées par une extension, la première à Juvisy, la seconde à Paris, qui ont pour deuxième point commun d'avoir pris un sérieux retard et pour troisième d'avoir fait cause commune sur le matériel roulant avec des rames de 32 m au gabarit 2,40 m : 39 des 60 rames de ce marché ont été commandées. Cependant, la livraison de ces extensions n'aurait guère lieu avant 2025-2030 : le marché ouvert en 2009 sera-t-il toujours disponible à cette date ?
Saint Denis - Rue de la Poterie - 14 janvier 2015 - Concentrer les Citadis du marché de 2009 sur T7 ou T8 permettrait de préserver l'unicité de parc avec les futures extensions... mais que le rythme de développement du tramway en Ile de France est lent ! © transportparis
Dans l'hypothèse où il ne serait plus possible de l'utiliser, le scénario de repli pourrait être le suivant : concentrer les Citadis 302 série 700 et 800 sur une seule ligne et rééquiper la ligne déshabillée par du matériel neuf, éventuellement en utilisant le marché prévu pour T1, portant sur 120 unités au gabarit similaire, dont 37 en tranche ferme pour le renouvellement des TFS.
Gennevilliers - Avenue du Général de Gaulle - 5 novembre 2020 - Qui succédera aux TFS ? Compte tenu des positions extravagantes d'Alstom sur le dossier MI20, l'important marché de 120 rames, pour lequel il est candidat, semble un - modeste - moyen de pression à disposition d'Ile de France Mobilités. CAF est en embuscade. © transportparis
Pour T10, le grand marché prévu en commun avec T9 laisse une bonne marge de manoeuvre pour couvrir le développement de ces lignes sachant qu'à ce stade, il n'y a pas de projet concret pour étendre T9... même si les idées ne manquent pas.
En revanche, on ne voit à ce stade poindre aucun nouveau projet puisque la conversion du TVM n'est qu'une hypothèse dans la modernisation de ce BHNS. C'est peut-être parce qu'il n'y a que l'embarras du choix parmi une bonne centaine de lignes qui mériteraient d'abandonner l'autobus pour un mode de transport plus capacitaire et plus performant...
T9 : retour du tramway sur un axe historique
Inauguration pluvieuse, inauguration heureuse ! C'est ce qu'on souhaite à la neuvième ligne de tramway de l'agglomération parisienne, et la troisième à pénétrer, fut-ce de la pointe des bogies des nouvelles rames Citadis 405 sur le territoire de la Ville de Paris. T9 fait donc ses débuts ce 10 avril.
Longue de 10,5 km, comprenant 19 stations, la ligne est exploitée à l'aide de 22 rames de ce type, entretenus dans le nouvel atelier situé à Orly, accessible par un passage sous la Grande Ceinture au niveau du poste R, dans la pointe du raccordement avec l'axe Paris - Toulouse.
Presque 90 ans pour rénover les voies, c'est long !
Le service des tramways sur la ligne 83 fut remplacé par des autobus en 3 temps :
- le 9 mars 1931 entre Thiais et Choisy le Roi
- le 18 janvier 1932 entre Châtelet et la place d'Italie
- le 30 octobre 1933 entre la place d'Italie et Choisy le Roi
D'après les tableaux de l'ouvrage Les tramways parisiens de Jean Robert, la ligne 83 avait transporté 11 millions de voyageurs en 1926, soit entre 30 000 et 45 000 voyageurs par jour (selon qu'on divise par 365 ou par 261 pour lisser les effets des fins de semaine). Nul doute que son successeur transportera 3 à 4 fois plus de monde à brève échéance.
Paris - Boulevard Masséna - 10 avril 2021 - Dernier jour d'exploitation pour la ligne 183 dans sa configuration radiale. De nombreux Lion's City quelque peu rincés après un service difficile sur une ligne surchargée. © transportparis
T9 n'est exploité ni par la Compagnie Générale Parisienne de Tramways, ni la Société des Transports en Commun de la Région Parisienne, ni par la RATP, mais par une filiale de Keolis, en charge également de certaines lignes d'autobus du secteur. Le tramway est établi sur un tracé de 10,3 km entre la porte de Choisy et le centre d'Orly (station Gaston Viens), soit un ripage vers le sud par rapport à l'ancien tracé, au bénéfice de Thiais (qui retrouve le tramway), d'Orly (qui le découvre) mais au détriment de Paris, puisque la ligne se limite aux Maréchaux.
Paris - Station Porte de Choisy ligne 7 - 10 avril 2021 - Côté RATP, l'information n'est pas encore totalement à jour, mais après tout, plusieurs stations n'ont pas encore intégré le prolongement à Saint Ouen de la ligne 14...). L’application de la nouvelle charte apparaît déjà aléatoire puisque les indices des lignes de tram sont à l’ancienne mode alors que les logos Tram et Bus sont conformes... © transportparis
Une première journée plutôt réussie
Cette mise en service revêt un caractère particulier : c'est en quelque sorte le jour 1 de la mise en concurrence dans le pré carré de la RATP. Il faut le dire : c'est la première fois qu'est inauguré un tramway en Ile de France pour lequel l'information voyageurs et surtout la priorité aux carrefours fonctionnent correctement. Voilà qui tranche avec 15 ans de démarrages laborieux... et pas toujours réglés depuis (voir le dossier de transportparis sur l'exploitation des tramways) ! Keolis avait tout intérêt à mettre tous les atouts de son côté : les gestionnaires de voirie ont semble-t-il aussi apporté leur pierre à l'édifice.
Vitry - Avenue Rouget de Lisle - 10 avril 2021 - La réalisation de T9 a été accompagnée d'une importante requalification de la voirie avec une part importante de végétalisation, selon des dispositions classiques pour un tramway français : mais c'est quand même bien plus joli ! L'arrivée du tramway coïncide aussi avec l'achèvement de programmes immobiliers. Dans ce secteur, la future correspondance avec la ligne 15 du métro devrait profondément faciliter les déplacements dans ce secteur. © transportparis
Les conducteurs ont été à bonne école, car ils n'ont pas peur de se lancer sur un itinéraire plutôt facile qui, à terme, permettrait une vitesse de 50 à 60 km/h sur l'essentiel du parcours. Pour l'instant, les tramways roulent entre 40 et 50 km/h... et franchissent les carrefours à 40 km/h. C'est mieux ! La signalisation est réduite à l'essentiel : c'est totalement à l'opposé des dernières réalisations exploitées par la RATP (cas notamment de T8 qui confine à l'excès)
En revanche, le service a été perturbé une vingtaine de minutes : un automobiliste s'était garé sur les voies du tram !
Orly - Avenue Albert Raynal - 10 avril 2021 - Orly, terminus à l'entrée du centre de cette ville plus connu pour ses dimanches à l'aéroport... Le prolongement de la ligne vers l'aéroport reste une hypothèse à ce stade. © transportparis
Quelques points faibles (quand même)
La pluie de la journée a en revanche mis en évidence que la surface abritée des quais est trop limitée. L'esthétique est plaisante mais le côté fonctionnel présente des lacunes. Au chapitre du confort, à bord des rames, la cambrure des sièges est un peu trop prononcée, ce qui s'avère vite désagréable. Il faudra aussi revoir les annonces, un peu trop nombreuses ce qui se révèle assez pénible pour les voyageurs faisait des grands parcours à bord du tramway.
Les terminus ont une configuration assez particulière :
- à la porte de Choisy, l'arrière-gare comprend une seule voie pour la manoeuvre en tiroir et une voie de stationnement pour une rame en réserve ou avariée. Il ne peut donc y avoir que 3 rames en exploitation dans la station, ce qui peut se révéler un peu juste avec une cadence à 4 minutes ;
- à Orly, le tiroir ne comprend qu'une seule voie car il n'y a pas la place pour en installer une seconde, mais dans la courbe entre l'avenue Raynal et l'avenue des Martyrs, il existe une position d'attente entre le tiroir et le quai pour Paris.
Orly - Avenue des Martyrs de Châteaubriant - 10 avril 2021 - Le tiroir ne comprend qu'une seule voie à Orly, faute de quoi le trottoir aurait été supprimé... On aperçoit sur ce cliché un GX137 de la ligne 3, qui intègre le lot de délégation de service public comprenant le T9, et prend dès demain l'indice 483 : un début de mise en ordre de la numérotation des lignes ? © transportparis
On évaluera dans quelques mois la compatibilité de ces installations avec la réalité de l'exploitation.
Perspectives pour T9
Le terminus de la porte de Choisy est perpendiculaire aux voies du T3, ce qui a au moins le mérite de faciliter un prolongement - à ce stade très hypothétique - vers la place d'Italie, ce qui serait utile pour accéder directement aux lignes 5 et 6 du métro et ainsi éluder une correspondance à de nombreux voyageurs pour améliorer leur diffusion dans Paris.
Paris - Porte de Choisy - 10 avril 2021 - Déjà pas mal de monde pour un premier jour. Nul doute que T9 sera un grand succès : dès le premier jour, on avait l'impression que le tram est là depuis bien longtemps. En revanche, plutôt que de bifurquer vers le tiroir, on attend avec impatience une traversée du boulevard Masséna pour que T9 rejoigne la place d'Italie ! © transportparis
Paris - Boulevard Masséna - 10 avril 2021 - Deux tramways d'une même gamme, après quelques évolutions techniques (T9 dispose de rames type 405 avec doubles portes aux extrémités, et des bogies Arpège, comme sur le type 402 de T3, mais avec moteurs à aimants permanents), et de deux opérateurs différents. Les voies de T3 et T9 sont strictement étanches. La notion de réseau se heurte à l'étanchéité des esprits franciliens... Par contre, le panneau indiquant un itinéraire cyclable confine ici au gag (sauf pour d'éventuels vélo-rails à condition qu'ils soient au bon écartement...). © transportparis
Quant à la desserte d'Orly, un prolongement vers l'aéroport serait assez justifié mais il posera la question de la compatibilité T7 - T9 puisque le gabarit des deux lignes est différent (32 m x 2,40 m pour la première, 45 m x 2,65 m pour la seconde).
Enfin, on espère un jour que T9 croisera une autre ligne de tramway dans le Val de Marne, succédant au duo TVM-393 lui aussi en limite de capacité. Une étude est en cours : un petit espoir...
Un regret pour terminer : que la motrice n°505, ex-CGPT, qui a arpenté la ligne 83 pendant 3 décennies, n'ait pas été de sortie. Les transports parisiens ont bien un problème avec leur passé...
T9 : ouverture le 10 avril
C'est la date désormais annoncée : dans un mois, la ligne T9 sera mise en service entre la porte de Choisy et la station Gaston Viens à Orly. Cette ligne sera exploitée par Keolis, avec certaines lignes de bus du secteur. Le retour du tramway sur cet axe entraîne évidemment une évolution du réseau de bus dans le secteur.
Principales évolutions : la ligne 103 abandonne la desserte du marché de Rungis, reprise à partir de Choisy le Roi par la ligne 183. Une nouvelle ligne 382 est créée entre la gare du pont de Rungis et celle des Ardoines. L'actuelle ligne 2 devient 482 et rejoint Belle Epine depuis la gare du Pont de Rungis. La ligne 3 devient 483 et la ligne 8 devient 480. La navette entre l'aéroport d'Orly et la gare du Pont de Rungis est supprimée, remplacée par cette recomposition du réseau de bus.
T9 - 183 : quelques semaines de cohabitation
Les essais du nouveau tramway T9, qui sera exploité par Keolis, ont débuté fin novembre dernier. Pour l'instant, les rames circulent sur la section sud du parcours, dont les travaux sont les plus aboutis. L'occasion d'aller traquer, appareil photos en main, la coexistence avec la ligne 183, exploitée par la RATP, qui vit donc ses dernières semaines avec ses autobus articulés MAN Lion's City.
Choisy le Roi - Avenue Léon Gourdault - 15 janvier 2021 - L'esthétique des rames Citadis 405 de la nouvelle ligne T9 est plaisante à l'oeil... et les rames ont enfin des doubles portes en extrémité ! En revanche, compte tenu de l'affluence prévisible, n'avoir misé que sur des rames de 44 m commence à poser question quand on voit émerger des rames de plus grande longueur sur des réseaux où les lignes sont pourtant bien moins fréquentées. Si les quais sont assez larges, il semble déjà que la surface couverte soit assez faible, ce qui est dommage. Notez les totems à l'entrée en station, marquant fortement l'empreinte de l'autorité organisatrice. © transportparis
Choisy le Roi - Avenue Léon Gourdault - 15 janvier 2021 - L'un arrive, l'autre part : la ligne 183 va céder sa place au T9, la cohabitation n'ayant vocation à durer que le temps des essais. Durant cette période de travaux, la ligne de bus a perdu son site propre... mais c'était pour la bonne cause ! © transportparis
Choisy le Roi - Carrefour Rouget de Lisle - 15 janvier 2021 - Rêvons un peu : un jour, un croisement de tramways entre T9 et l'actuel site propre accueillant le duo TVM - 393 qui mériterait amplement d'être converti à un mode plus capacitaire ! © transportparis
T9 : effectif au complet
L'autre nouveauté des prochains mois, le tramway T9, vient de recevoir sa 22ème rame Citadis. Les essais de vérification des installations ont débuté sur la section Orly Gaston Viens - Choisy le Roi Rouget de Lisle... à toute petite vitesse évidemment. Ils débuteront en janvier prochain sur la section Paris - Choisy le Roi.
Keolis se prépare donc à l'exploitation de cette ligne de tramway pas tout à fait comme les autres, puisque c'est la première dont l'exploitation n'a pas été attribuée d'office à la RATP mais confiée à un opérateur après appel d'offres. Pour la filiale du groupe SNCF, c'est évidemment une vitrine qu'il s'agira de soigner car les regards ne manqueront pas, surtout pour pointer les moindres failles. On pourra aussi - reconnaissons que c'est un peu perfide - dresser quelques comparaisons avec d'autres lignes, au hasard T4 et T11, dont les difficultés de fonctionnement ne cessent d'augmenter.
Comme sur tous les autres tramways franciliens, il ne vous échappera pas qu'il faudra surveiller la qualité de fonctionnement de la priorité aux carrefours, car ce sera l'un des éléments déterminants dans la qualité de l'exploitation et la régularité. En la matière, les autres lignes sont plutôt à la traîne avec un niveau de priorité encore insuffisant, même si on a pu constater quelques progrès (à confirmer dans les prochains mois).
Rendez-vous au printemps...
Les Citadis 405 de T9 sur leur atelier de maintenance et de remisage. (cliché Ile de France Mobilités)
T9 : ouverture repoussée au printemps 2021
Ce devait être l'autre grande nouveauté des transports franciliens de cette fin d'année, mais le covid-19 a imposé son rythme : le tramway T9 ouvrira donc plutôt au début du printemps 2021. La date n'est pas encore officialisée mais le retard de 3 mois a été indiqué par l'AUT Ile de France. Encore un peu de patience pour les usagers de la ligne 183 !
Profitons-en pour rappeler, encore une fois, que la motrice historique n°505 ex-CGPT, qui roulait sur cet itinéraire, est l'unique motrice parisienne en état de marche... A bon(s) entendeur(s)...
Tervueren - 19 septembre 2010 - Au cours des 125 ans de l'UITP, au cours d'un week-end mémorable pour les tramophiles européens, les parisiens pouvaient enfin voir la 505 circuler à une allure soutenue. Cette motrice de 1907 avait, comme d'autres représentantes de grandes villes, acheminé les congressistes puis le grand public pour cette manifestation inédite. La 505 avait été habillée aux couleurs de la ligne 44 Suresnes - Porte Maillot, en clin d'oeil au parcours de la ligne 44 bruxelloise vers le bois de Tervueren, mais sa carrière parisienne fut exclusivement dans le sud parisien, dont la ligne 83 ancêtre du futur T9 ! © transportparis
La desserte de l'aéroport d'Orly
L'aéroport d'Orly a un peu plus de chance : l'arrivée du métro - la ligne 14 - y suscite moins de polémiques qu'à Roissy, avec la ligne 17 et CDG Express. Pourtant, la création de la ligne 18 vers Saint Quentin en Yvelines reste toujours aussi décriée pour son surdimensionnement, même avec le développement du plateau de Saclay.
Cependant, Orly souffre encore aujourd'hui de ne pas disposer de liaison directe rapide vers le centre de Paris, autrement que par autobus. Le RER C le tangente par le nord, imposant une correspondance par autobus qui n'est pas vraiment flatteuse, s'ajoutant à la réputation de lenteur de cette ligne. Orlyval devait apporter une réponse, mais elle a tourné au fiasco financier et rabat les voyageurs vers un RER B de plus en plus en proie à la saturation. Autant dire que la ligne 14 est attendue avec impatience... mais il va falloir être patient et prudent, car cette ligne, qui devient l'aspirine de tous les maux des transports franciliens, voit tout juste les tunneliers entrer en action. Autant dire qu'une mise en service mi-2024, pour les Jeux Olympiques, est un objectif très ambitieux...
Aéroport d'Orly - 7 février 2020 - Deux vues d'Orlyval au sein de la zone aéroportuaire, vu depuis l'intérieur d'une rame et depuis la passerelle (vitrée, pardon pour le reflet) de sortie de la station du terminal 4. Une naissance difficile et un avenir incertain pour le premier métro automatique d'Ile de France... © transportparis
L'arrivée de la ligne 14 à Orly pose immédiatement la question du devenir d'Orlyval, et plus globalement de l'évolution de la desserte de cette vaste zone d'emplois du sud francilien, avec une dimension supplémentaire par une desserte nationale avec les liaisons Intersecteurs : transportparis les aborde dans son nouveau dossier.
2020-2030 dans les transports franciliens
Un nouveau cap, même si on ne change pas encore de décennie (ce sera l'année prochaine). 2020, un chiffre rond et qui a longtemps été considéré comme une échéance forte dans de nombreux projets. C'est l'occasion pour transportparis de dresser un petit bilan et les premières perspectives à commencer par cette nouvelle année.
2020 : l'année de tous les miracles selon certains. Souvenez-vous : le Grand Paris Express devait être intégralement en service, EOLE était à Mantes la Jolie, LNPN désaturait la desserte de la Normandie et les tangentielles réactivaient la Grande Ceinture au nord et à l'ouest. Limitons ici ce florilège de peur d'entamer l'année dans un sarcasme déprimant. Encore que, les promesses, ça n'engage que ceux qui les écoutent !
Deux nouveautés en 2020
Dans les transports franciliens, cette année sera marquée d'abord par la mise en service du prolongement de la ligne 14 du métro de Saint Lazare à la mairie de Saint Ouen, projet qui accuse plus de 3 ans de retard sur le calendrier initial, avec l'arrivée des MP14 à 8 voitures. Arrivée dans les délais en revanche du tramway T9 entre la porte de Choisy et Orly, aboutissement de 35 ans d'aménagements sur la ligne 183.
Métro : des tunneliers en pagaille, des extensions qui se profilent mais des automatisations en question
Le Grand Paris Express : les tunneliers s'en donnent à coeur joie pour réaliser la ligne 15 mais les ingénieurs se creusent les méninges pour trouver une solution d'insertion de la station de métro à La Défense. La ligne 17 est - heureusement - suspendue suite à l'abandon du projet Europacity. La ligne 18 est toujours aussi contestable... et de nombreuses zones d'ombre demeurent sur ce nouveau réseau : à commencer par son coût réel, et le financement de l'exploitation des lignes.
Restons au chapitre du métro pour revenir au réseau historique : la bonne nouvelle, c'est qu'on est en train de voir le bout du tunnel pour les extensions des lignes 4 (à Bagneux), 11 (à Rosny sous Bois) et 12 (à Aubervilliers). Le prolongement de la ligne 14 à Orly a démarré en fanfare. En revanche, l'idée d'envoyer la ligne 11 à Noisy-Champs a disparu des radars. La compensation aux évolutions technico-politiques du Grand Paris Express s'est évaporée.
La ligne 4 sera automatisée... et ensuite ? La grève qui s'est installée dans la durée donne évidemment du crédit à l'option d'une automatisation accrue du réseau, mais pour l'instant, les perspectives restent floues et esquissent prudemment un scénario sur la ligne 13 à horizon 2035. Rien d'ici là ? Ce serait assez surprenant et mettrait Paris en retrait de la dynamique mondiale alors que la RATP se veut un acteur de référence du transport urbain.
RER et Transilien : EOLE et de nouvelles rames toujours en vedette
Du côté des RER et des Transilien, la décennie sera d'abord celle du renouvellement des générations : poursuite des livraisons de Franciliens et de Régio2N, RERng pour le RER E et le RER D, MIng pour le RER B, avec à la clé l'épuration des premières séries de Z2N, la fin de carrière pour les VB2N et à très court terme des emblématiques Z6400. La traction Diesel sera complètement éliminée d'Ile de France puisque, finalement, les sections Gretz - Provins et Trilport - La Ferté Milon seront électrifiées, avec emploi de Franciliens à la clé et la cession des AGC bimodes aux Régions, qui vont probablement jouer des coudes pour récupérer tout ou partie de ces 24 rames.
EOLE : pour l'instant, le projet touche du bois. La réalisation de la gare de La Défense sous le CNIT progresse dans difficultés majeures, le saut-de-mouton de Nanterre prend forme, les premiers coupons de rail sur le site de l'atelier de La Folie ont été posés et Virgine creuse sous Courbevoie à bon rythme. Les travaux de la gare de la porte Maillot débuteront aussi cette année mais la calendrier actualisé des chantiers peut laisser songeur puisque le génie civil de la gare ne serait achevé qu'à l'été 2022, soit 6 mois avant la mise en service annoncée du prolongement à Nanterre.
Du côté des tangentielles, ce n'est pas glorieux. La ligne T13 est bien en travaux pour une première phase de Saint Germain en Laye à Saint Cyr, mais on renoncera à compter les années de retard par rapport au calendrier initial (vous pouvez quand même relire notre dossier). Les travaux sur T12 ont débuté quand la ligne aurait dû être mise en service. Quant à T11, on a perdu de vue les échéances de prolongement du Bourget à Noisy le Sec et d'Epinay sur Seine à Sartrouville.
Tramways : le temps des incertitudes ?
Passons aux tramways : le rythme s'est sensiblement ralenti et on peine à voir un nouveau souffle pour continuer la réintroduction de ce mode de transport en Ile de France. Les projets déjà anciens, comme les extensions de T1, ne sont pas forcément dans une posture très favorable : incertitude sur le financement de la section Asnières - Rueil-Malmaison à l'ouest, probable phasage de la section Noisy le Sec - Val de Fontenay à Montreuil, débats toujours en cours sur l'extension de T7 entre Athis-Mons et Juvisy qui constitue pourtant la raison d'être de cette ligne. Certes, T3 continue sa voie avec le début des travaux vers la porte Dauphine et les premiers chantiers sur T10 ont débuté. Mais après ?
Bus : électrifier, oui mais comment ?
Du côté des autobus, la mutation de la décennie à venir est évidemment électrique, mais pour l'instant, la transition énergétique présente quelques faiblesses. Le bus hybride n'a pas suscité un grand enthousiasme, mais il en circule plusieurs milliers en Ile de France. Les motorisations au gaz semblent faire leur retour dans une situation d'attente, car l'autobus électrique, dont on a vanté peut-être trop rapidement les vertus, reste encore l'exception : coût, autonomie, maturité du marché font aujourd'hui question. Le choix des opérateurs, et notamment de la RATP, d'aller vers des solutions totalement sur batteries est aujourd'hui un point critique. Alors qu'on le croyait ringard, les nouvelles générations de trolleybus font une percée qui n'est pas anecdotique si on regarde le mouvement à l'échelle européenne. En France, Limoges, Saint Etienne et Lyon passent des commandent, envisagent des électrifications nouvelles. D'autres villes y songent de plus en plus. Et pourquoi pas en Ile de France ?
Contractualisations : une année mouvementée
La renégociation des contrats d'exploitation avec la RATP et la SNCF est un des sujets majeurs des transports franciliens, tous les 4 ans, donnant lieu à d'âpres négociations avec Ile de France Mobillités. L'année 2020 débute difficilement sur ce plan. Dans le contexte de la grève, la Région a imposé un remboursement intégral des abonnés, manifestement contre une RATP cherchant plutôt à réduire l'impact financier d'une telle mesure. Avec la SNCF, le calendrier a dérapé, et d'après l'AUT Ile de France, le nouveau contrat ne serait pas signé avant l'été.
L'année 2020 est aussi celle qui verra les contrats avec les réseaux de grande couronne profondément évoluer : fini le droit du grand-père, les opérateurs historiques sur ces territoires devront passer par la case de l'appel d'offres, selon une procédure classique de délégation de service public bien connue des réseaux de province. Pour Ile de France Mobilités, c'est assurément une mutation qui renforce sa position, mais accentue aussi la nécessité d'équipes solides au regard de la tâche à accomplir au cours des prochaines années : il existe aujourd'hui près de 140 contrats en gré à gré pour exploiter ces réseaux urbains et interurbains, qui ont d'abord été redéfinis en 39 lots par bassin de vie. L'ouverture des réseaux Optile précède de 4 ans la première échéance concernant la RATP : en 2024, Ile de France Mobilités mettra en appel d'offres le réseau d'autobus de Paris et de la petite couronne. En 2029, ce sera le tour des tramways, ce qui risque d'être modérément mobilisateur étant donné que les lignes sont autonomes : si cela facilite la passation des marchés en limitant les interdépendances, le volume relativement réduit d'activité ne sera pas un atout sur ce mode. Pour mémoire, métro et RER ne seront concernés qu'en 2039.
Pour la SNCF, un régime spécifique à l'Ile de France est aussi appliqué : Ile de France Mobillités peut ouvrir à la concurrence l'exploitation des nouvelles lignes dès à présent. Pour le réseau existant, la première étape concernera les lignes Transilien hors RER. Les 5 lignes de RER seront concernées à partir de 2033. Ce délai s'explique assez naturellement par la sensibilité du dossier et la complexité de l'allotissement (surtout quand il s'agit du RER C...)
Ville, urbanisme, rôle de la voiture
Et puis la décennie à venir posera encore un peu plus la question du rôle de la voiture et de la place qu'on lui accorde dans l'espace public. La Ville de Paris a fermé les voies sur berges, développé à la hussarde des pistes cyclables, pas toujours très bien conçues et parfois au détriment des autobus : si assurément le vélo est appelé à jouer un rôle plus important dans les déplacements quotidiens, en particulier les courts et moyens trajets, il faudra apaiser le climat et remettre en perspective l'ensemble des modes de déplacement... et surtout éviter qu'un mode utile mais individuel ne pénalise un mode collectif financé par la collectivité et donc par tous...
Cette décennie sera celle du recul de la place accordée à la voiture, même si celle-ci devient électrique... et même si elle arrive à être autonome (ce qui n'est pas encore totalement avéré à très grande échelle), qui ne sera acceptable par la population qu'à condition d'être financièrement accessible. En outre, toute électrique et autonome soit-elle, les transports en commun demeurent l'outil le plus efficace pour limiter la pollution et la congestion urbaine. Cela suppose donc de franchir de nouveaux paliers d'augmentation de capacité, de performance et surtout de fiabilité.
Enfin, il faut aussi espérer une évolution des mentalités et des conceptions de l'urbanisme. Il faut cesser de croire que la technique compensera tous les méfaits de non-choix politiques en matière d'aménagement du territoire et d'urbanisme. La saturation du RER A, celle du RER B aussi, sont le fait d'une tentation à l'hyperconcentration des emplois localisés de façon diamétralement opposée aux principales zones d'habitat. Il est plus que jamais temps de réinterroger ce modèle spatial. Il faudra aussi mettre en question les tentations extensives qui conduisent à une augmentation des distances parcourues au quotidien et alimentent un usage croissant de la voiture en grande couronne. Pour autant, l'alternative n'est pas une hyper-densification à l'asiatique, mais dans une évolution progressive du modèle urbain. Bref faire preuve de nuance, ce qui a tendance à se perdre ces dernières années...
Bonne année !