Banlieue Est : notre prospective actualisée
Suite de l'actualisation de notre série de dossiers de prospective sur les lignes Transilien, avec cette fois-ci le cas de la ligne P.
Les derniers mois ont été évidemment marqués par l'électrification de la section Gretz - Longueville - Provins, qui a permis d'augmenter la capacité des trains en utilisant des Franciliens. Le recours à la traction thermique a donc significativement diminué, mais il reste encore à convertir la seciton Trilport - La Ferté-Milon. Les premières études sur ce cas ont désormais plus de 15 ans. Si l'enjeu énergétique existe, il est de portée plus modeste. Cette opération sera le moyen de lever la contrainte empêchant la mise en accessibilité complète de la gare de Meaux, dont les quais doivent réceptionner à la fois des trains à plancher bas et à plancher haut.
Provins - 17 mars 2023 - Etendant encore un peu plus leur rayon d'action, les Z50000 de l'est sont celles qui ont le plus fréquemment l'occasion de se dégourdir les bogies à 140 km/h tant vers Meaux, Coulommiers que désormais Provins. © transportparis
Cependant, la ligne de La Ferté-Milon pimente les échanges entre l'Etat et la Région, car elle nécessite aussi des travaux de renouvellement. Or il s'agit de l'une des sections du réseau francilien considérée de desserte fine du territoire. L'Etat demande une prise en charge substantielle de la Région à la maintenance patrimoniale, mais cette dernière considère qu'elle incombe au propriétaire, donc à l'Etat. La Région en revanche est prête à financer l'électrification de la ligne. Les discussions vont assurément se poursuivre durant la négociation du prochain Contrat de Plan Etat-Région.
Ce cas demeure néanmoins assez anecdotique au regard des autres perspectives concernant le réseau ferrovaire de l'Est francilien. A commencer d'abord par le RER E, avec la confirmation du prolongement à Roissy-en-Brie de la mission faisant actuellement terminus à Villiers-sur-Marne, afin de délester celle de Tournan. Au-delà, il ne faut pas perdre de vue les marges de manoeuvre à long terme pour ajouter une mission supplémentaire sur chaque branche, mais cette perspective semble s'éloigner, notamment sur celle de Tournan, puisque la ligne 15 doublera le RER E entre Rosny Bois-Perrier et Nogent - Le Perreux.
Villiers-sur-Marne - 17 novembre 2022 - Ces MI2N en direction de Tournan s'engagent sur la section qui sera mise à 3 voies afin de prolonger la mission Villiers-sur-Marne jusqu'à Roissy-en-Brie, tout en préservant les circulations rapides de la ligne P et des trains régionaux. Les MI2N sont appelés à disparaître au fur et à mesure qu'arriveront les RERng. © transportparis
Esbly - 20 février 2023 - Les Z50000 sont devenues incontournables avec 360 rames en Ile-de-France. Elles pourraient encore étendre leur rayon d'action jusqu'à La Ferté-Milon moyennant électrification. Le prolongement de la moitié des trains faisant terminus à Meaux aura pour effet d'accroître la population pouvant accéder à la ligne 16 à Chelles. © transportparis
En revanche, en tête d'affiche, figure toujours la connexion entre le réseau ferroviaire et la ligne 15 du Grand Paris Express : le coût de la partie ferroviaire de la gare reste un irritant majeur et il est désormais impensable qu'elle soit réalisée à la mise en service du nouveau métro. Reste à savoir quand pourrait-elle voir le jour... si le projet est finance !
Dernier point dont l'échéance se rapproche petit à petit : la succession des Z2N, aujourd'hui quasiment dédiées à la mission Château-Thierry. Il faudra très certainement un matériel compatible avec des quais de 550 mm et de 920 mm. Les besoins en Franciliens liés à l'électrification de la branche de La Ferté-Milon pourraient être couverts moyennant un complément de parc de la future automotrice Z2Nng, afin d'assurer une partie de la mission Meaux (et plus particulièrement les trains y faisant terminus) avec des rames pour augmenter leur capacité d'emport.
Trilport - La Ferté-Milon : vents contraires
Il y a d'un côté une bonne nouvelle : Ile de France Mobilités confirme l'utilité de l'électrification de la section Trilport - La Ferté-Milon, pour restructurer la desserte de la ligne P, soulager la gare de Meaux de mouvements à vide et uniformiser la hauteur des quais en éliminant à terme les AGC à plancher bas. L'idée n'a il est vrai été émise qu'il y a une vingtaine d'années... A partir de septembre, ce sera la dernière ligne francilienne nécessitant des trains à traction thermique.
Donc, en prolongeant la moitié des trains Paris - Meaux jusqu'à La Ferté-Milon, les voyageurs gagneront en capacité et en commodité en systématisant la desserte directe sans correspondance à Meaux. Le temps de trajet supplémentaire lié à la desserte des gares de Chelles à Meaux étant compensé par la suppression du délai de 7 minutes existant aujourd'hui entre le train Paris - Château-Thierry et le service Meaux - La Ferté-Milon. L'ensemble du service relevant alors de Z50000, il sera possible d'achever la mise en accessibilité de la gare de Meaux en relevant ses quais à 920 mm.
Crouy sur Ourcq - 4 mars 2022 - Jadis itinéraire bis de Paris à Reims, Trilport - La Ferté-Milon est aujourd'hui cantonnée à la fonction d'antenne de très grande banlieue. C'est la plus provinciale des lignes franciliennes. © transportparis
Le coût de l'électrification est tout de même évalué à 101 M€ à horizon de réalisation, prévue en 2030. Pour 29 km de double voie, cela fait beaucoup, de l'ordre de 2 M€ du kilomètre linéaire.
Cependant, pour l'instant, le point de discorde le plus sensible porte sur l'infrastructure : Trilport - La Ferté-Milon est l'une des lignes considérées de desserte fine du territoire. Le renouvellement est au centre du débat entre l'Etat, SNCF Réseau et Ile de France Mobilités, qui n'entend pas solliciter les budgets des collectivités locales, contestant la forme (la classification de la ligne) et le fond, à savoir le report de la charge d'investissement sur l'autorité organisatrice, qui rappelle qu'elle avait jadis accepté de payer au coût complet les péages de sorte à couvrir justement le renouvellement. Néanmoins, du point de vue tarifaire, Ile de France Mobilités paie bien des redevances pour la catégorie « desserte fine »... mais en principe, le renouvellement ne peut incomber qu'au propriétaire, donc à l'Etat. On sait bien que depuis 2005, c'est loin d'être le cas et l'utilisateur risque encore d'être mis à contribution...
Trilport - La Ferté Milon : le retour de l'électrification ?
Projet revenant de façon cyclique depuis plus de 10 ans, l'électrification de la section Trilport - La Ferté Milon a peut-être bénéficié d'un coup d'accélérateur avec la déclaration de la présidente de la Région Ile de France. Alors que les travaux préparatoires ont débuté entre Gretz et Provins dans le cadre du projet Paris - Troyes, la dernière ligne non-électrifiée d'Ile de France était dans l'incertitude, malgré sa réapparition en 2009 dans le Schéma Directeur du Matériel Roulant.
Outre réduire l'usage d'énergies fossiles, ce projet pourrait améliorer la régularité du réseau Est à condition de repenser la desserte, comme nous l'avions déjà suggéré, en prolongeant la moitié des missions Paris - Meaux (desservant Chelles, Vaires-Torcy, Lagny et Esbly). Les cisaillements des AGC effectuant aujourd'hui la navette Meaux - La Ferté Milon seraient supprimé, tandis que seuls 2 trains par heure en pointe (1 en journée) continueraient à faire terminus à Meaux sur la voie centrale. La perte de temps liée aux 4 arrêts supplémentaires serait compensée par la suppression de la correspondance et de son délai minimum de 7 minutes entre une mission directe Meaux (relation Paris - Château-Thierry) et la navette pour La Ferté Milon.
La Région demande - déjà - l'inscription de l'électrification de Trilport - La Ferté Milon au prochain CPER : les premières estimations tablent sur 70 M€, ce qui semble relativement élevé. SNCF Réseau pourrait tirer profit de cette annonce pour trouver dans ce projet un terrain d'application pour une caténaire économique afin de limiter la facture...
Prospective Transilien Paris Est : quelles évolutions ?
Suite aux échanges à la suite de la parution de notre dossier sur la desserte de Marne la Vallée, il était apparu utile de toiletter le dossier de transportparis concernant les évolutions de desserte sur le réseau Paris Est, bref sur le RER E et la ligne P. C'est désormais chose faite.
Par principe, nous avons maintenu notre proposition décalée sur la correspondance entre le RER E et la ligne 15 du Grand Paris Express à Villiers sur Marne. On l'a bien compris, sa probabilité est désormais quasiment nulle. Mais c'est un peu pour l'histoire... et le principal risque, c'est de ne pas avoir de correspondance entre les deux.
En revanche, nous avons fait évoluer quelques éléments de réflexion :
- si nous maintenons le prolongement de la moitié des Paris - Meaux à La Ferté Milon par l'électrification de la section à partir de Trilport, nous propons désormais de réutiliser le sillon entre Paris et Trilport pour créer une mission La Ferté sous Jouarre qui augmenterait la capacité de cette branche ;
- nous intégrons la desserte de Chelles sur les missions Château Thierry pour la correspondance avec la ligne 16, sujet qui doit également être examiné à la lumière du déploiement de l'ERTMS niveau 2 sur la ligne Paris - Strasbourg, maillon du corridor européen Allemagne - Espagne.
A retrouver donc ici...