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transportparis - Le webmagazine des transports parisiens

Métro parisien : l'architecture des stations

Oublions un instant que le métro est un système de transport qui génère des facilités mais aussi quelques tracas et intéressons-nous à l’objet architectural : conçu à la fin du 19ème siècle, il a suivi en partie l’évolution de ce qu’on appelle aujourd’hui le design, mais aussi les considérations sanitaires, les progrès techniques et l’apparition de nouvelles technologies destinées à développer l’offre de service sur le réseau.

Principes généraux de constitution des stations souterraines

Et avant de parler des stations, quelques principes de base sur la construction des tunnels à l'origine du réseau du Métropolitain :

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(archives CMP - Extrait de Un siècle de métro en 14 lignes, éditions La Vie du Rail)

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Constitution d'une station souterraine classique à 2 voies et 2 quais. (archives CMP - Extrait de Un siècle de métro en 14 lignes, éditions La Vie du Rail)

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Constitution d'une station souterraine à plafond métallique à 2 voies et 2 quais. (archives CMP - Extrait de Un siècle de métro en 14 lignes, éditions La Vie du Rail)

Les stations construites généralement à faible profondeur (en moyenne à 6,50 m du sol) sont assez standardisées :

  • Stations à couverture métalliques : elles ont été réalisées en tranchée ouverte. Leurs murs sont droits et la couverture de la station est assurée au moyen de poutres métalliques d’une portée de 5,7 m entre lesquelles ont été construits des voutains en briques.
  • Stations voûtées : soit elles ont été réalisées selon la méthode de la galerie d’avancement, sauf cas particuliers.

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Opéra - Ligne 3 - Première réalisée et donc la moins profonde, la station Opéra de la ligne 3 est recouverte par une couverture métallique avec voutains en briques entre les poutres qui ont bénéficié au gré des évolutions de décoration, d'une mise en peinture colorée et, dans le cas présent, de grands carreaux non biseautés et posés verticalement. © T. Giesen

La station type est longue de 75 m, haute de 5,70 m, avec des quais larges de 4,10 m. Dès sa construction, la station Gare de Lyon sur la ligne 1 disposa de quais de 100 m de long, configuration unique sont l'origine n'est pas connue. Cette largeur fut portée exceptionnellement à 5 m dans les années 1920 lors de la construction des stations sous les grands boulevards en raison du trafic pressenti. Ces caractéristiques n’ont que peu évolué au fil du temps.

A la fin de 1931, la longueur des stations a été porté à 105 m sur les extensions des lignes 1, 7, 8 et 9 dans le but d’exploiter des trains de 7 voitures. Seul un essai eut lieu sur la ligne 8 pendant l’Exposition Coloniale de 1931. Cette disposition ne put être généralisée puisque les sections préexistantes étaient dotées de stations de 75 m. Elle a pourtant perduré sur pratiquement tous les prolongements jusqu’aux années 1970, la RATP projetant d’allonger les trains – et donc les stations – sur les lignes les plus chargées, une perspective malheureusement abandonnée.

Les stations anciennes des lignes 1 et 4 furent allongées à 90 m entre 1961 et 1967 pour augmenter la capacité de transport en admettant des trains de 6 voitures – Sprague d’abord, MP59 ensuite – d’une longueur de 90 mètres. Sur la ligne 1, les quais des stations à tablier métallique ont été allongés par le percement d’une galerie parallèle au tunnel, la consolidation de l’ouvrage étant assurée par des colonnes, d’où le terme d’allongement « en chapelle ». Néanmoins, toutes les réalisations ultérieures renouèrent avec le quai de 75 mètres, sauf à Miromesnil sur la ligne 13... choix d'autant plus étrange que Champs-Elysées Clémenceau sur la même jonction 13-14 adoptait des quais de 75 mètres !

Enfin sur la ligne 14 mise en service en 1998, les stations ont été dimensionnées à 120 m en prévision de l’exploitation de trains de 8 voitures... mais par souci d'économie, fut-elle symbolique, seuls 90 mètres furent aménagés à Saint Lazare, d'où les travaux de reprise de cette station dans la perspective du prolongement à Saint Ouen couplé à l'exploitation à 8 voitures.

Les premières stations aériennes

La première station aérienne du Métro apparut dès juillet 1900 avec le saut-de-mouton de Bastille franchissement le bassin de l’Arsenal. La station donnait en terrasse sur le bassin. Il n’y avait pas de revêtement particulier sinon des parements en briques de couleurs rouges et brunes. On en aperçoit encore aujourd’hui des traces en bout de quai vers La Défense. Cette terrasse fut aveuglée lors des modifications conséquentes à l'arrivée de la ligne 5, en 1907. La station a été à nouveau totalement refaite en 1960-1962 en prévision de l’arrivée des trains sur pneus. Elle perdait aussi la fameuse « Pagode », pavillon d’accès originel construit par Guimard en 1900 mais dont l’état de délabrement était marqué.

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La station Bastille vers 1903. La terrasse donne sur le Bassin de l'Arsenal. En arrière-plan, la passerelle prenant sur la Pagode d'accès depuis la place. Plus au fond, la verrière de la Gare de la Bastille d'où partaient les trains pour Boissy-Saint-Léger. La ligne 1 est encore exploitée avec des trains composés de remorques à deux essieux. (Collection Th. Assa)

Les autres stations aériennes apparurent en janvier 1903 sur la ligne 2-Nord (future ligne 2), de Barbès à Allemagne (actuelle station Jaurès). Parfaitement standards, ces quatre stations sont sur viaduc à colonnes. Elles allient le verre et la fonte, avec 20 baies en arche, ouvertes sur la voirie, et une couverture des quais par des verrières. Les murs sont revêtus du classique carreau blanc biseauté. L’aspect est assez réussi.

Ce style apparut encore partiellement à Passy sur la ligne 2-Sud (future ligne 5, puis 6), en novembre 1903. La station a la particularité d’être mi-souterraine, mi-aérienne, sortant de la colline de Chaillot. Mais déjà les murs n’étaient plus ajourés, entièrement recouverts de carreaux blancs.

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En janvier 1903, la ligne 2-Nord était prolongée de d'Anvers à Bagnolet (Alexandre Dumas). Quatre stations aériennes étaient construites pour deux raisons majeures : passer en viaduc les tranchées des Chemins du Nord et de l'Est et passer au-dessus du Canal Saint-Martin. La station Allemagne (aujourd'hui Jaurès), n'a guère changée depuis ses origines. On observe les banquettes hautes sur les quais et les plaques fixées sur le bas des structures de la station. La structure esthétiquement réussie, est légère avec deux demi-marquises et les grandes verrières latérales. Au centre du quai Direction Dauphine, la guitoune du chef de station qui restera une figure du Métro durant trois quarts de siècle. (Collection Th. Assa)

En avril 1906, le prolongement de la ligne 2-Sud à Italie, comportait près de la moitié de son tracé en viaduc. Les stations toutes identiques, différaient sensiblement de celles de la ligne 2. Plus lourdes d’aspect, elles ne comportaient plus d’ajours ; les murs étaient pleins et carrelés, solution plus économique. La marquise était d’un seul tenant, plus proche d’une véritable toiture en verrière. Ce modèle sera utilisé en mars 1909 lors de l’ouverture de la ligne 6 entre Italie et Nation. Seule la station Bel Air, au niveau du sol, tranchait ave des demi-marquises métalliques.

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La ligne 2-Sud est prolongée de Passy à Italie en avril 1906. D'une part pour passer la Seine et, d'autre part, pour des raisons économiques, presque la moitié du tracé est construit en viaduc. Les nouvelles stations comportent une structure plus lourde que celles de la ligne 2-Nord. On observe les plaques latérales de nom de la station (ici, Grenelle, devenue Bir-Hakeim - Grenelle) ; les grandes plaques perpendiculaires de direction ; l'alignement des banquettes d'attente ; les réclames sous les quais outre celles sur les panneaux des murs. Matériel mis à part, peu de choses ont changé depuis lors ... (Collection Th. Assa)

En revanche, les accès sont de conception similaire sur les lignes 2-Nord et 2-Sud, avec un premier escalier rejoignant un palier au-delà duquel s’en séparent deux autres pour chacune des directions. Une hauteur minimale de 5,20 m des viaducs était requise pour la circulation des tramways sous le métro.

Autres stations aériennes particulières : Gare d’Orléans (Austerlitz) sur la ligne 5, ouverte en juin 1906, qui est placée au-dessus des voies du Chemin de Fer d’Orléans. Elle se présente comme un gigantesque structure métallique suspendue. Elle n’a pas de murs en tant que tels, les quais étant suspendus sur une structure tenue par de grands croisillons métalliques. En bout de quai, les murs apparents sont recouverts de carreaux blancs avec des liserais verts. Enfin, la station Quai de la Rapée ouverte en juillet 1906 est située au-dessus du débouché du Bassin de l’Arsenal, en courbe. Elle présente deux quais protégés par de verrières en métal soutenues par des colonnes. Les murs sont agrémentés de briques bicolores, malheureusement masquées aujourd’hui par une peinture rouge orangé. De même, les colonnes ont été repeintes en bleu donnant un aspect disgracieux à l’ensemble.

Les stations aériennes sont restées exceptionnelles dans la construction du réseau. Hormis ces sections historiques, il fallut attendre les années 1970 pour voir le métro à nouveau à l'air libre avec le prolongement de la ligne 8 à Maisons-Alfort, franchissant la Marne dans une configuration particulière rattrapant la différence d'altitude entre les deux rives. Cette même ligne sera tracée à l'air libre à Créteil. A pareille époque, l'extension de la ligne 13 à Châtillon-Montrouge a été réalisée en parallèle à l'infrastructure ferroviaire rejoignant les installations de la SNCF de Montrouge, et depuis 1989 la ligne à grande vitesse Atlantique.

En revanche, le franchissement par la ligne 13 de la Seine entre Clichy et Asnières, incluant un long - et inesthétique - viaduc sur la Seine, tout comme le prolongement de la ligne 5 entre Pantin et Bobigny, s'ils sont aériens, ne comprennent aucune station à l'air libre. Même chose en 1992 lors de l'arrivée de la ligne 1 à La Défense, passant sur le pont de Neuilly mais sans station au grand air.

Des stations particulières

Outre les stations aériennes, le Métro comprend plusieurs stations particulières :

  • Villiers (lignes 2 et 3) : les stations sont parallèles mais, lors du prolongement de la ligne 3 vers la porte de Champerret, il fallut passer sous la ligne 2, imposant un décaissement important, expliquant la hauteur insolite de la station ;
  • Cité et Saint Michel (ligne 4) ont été réalisées dans les caissons métalliques conçus par l'entreprise Léon Chagnaud pour le premier prolongement de la Seine en tunnel, avec les cylindres de fonçage aux extrémités, accueillant les escaliers et ascenseurs ;
  • Gare de l’Est (lignes 5 et 7) avec une station à tablier métallique et une forme en V courbé liée à la géométrie particulière du tracé de ces lignes ;
  • La Fourche (ligne 13) : comme son nom l'indique, la station est à la divergence des branches vers les portes de Saint Ouen et de Clichy. Vers le nord, les trains desservent le même quai alors que vers le sud, les trains venant de la porte de Saint Ouen desservent une demi-station au niveau inférieur avec voie et quai unique
  • Mirabeau (ligne 10), station à 2 voies, mais de niveau différent et avec un seul quai uniquement en direction de la gare d'Austerlitz : son alter ego dans l'autre sens est Eglise d'Auteuil à voie et quai unique ;
  • La Motte Piquet (lignes 8 et 10), remaniée en 1937 avec la mise en service de la section vers la place Balard et le nouveau tracé de la ligne 10 reprenant la boucle d'Auteuil : la voie vers Balard dispose d'un quai situé sous la voie vers Auteuil, tandis qu'une demi-station à quai central a été constituée avec la voie vers la gare d'Austerlitz et Créteil ;
  • Liège (ligne 13), Commerce (ligne 8), et Anatole France (ligne 3) se caractérisent par leurs quais décalés du fait de la faible largeur des voiries ;
  • Chardon-Lagache et Eglise d'Auteuil (ligne 10) ont une voie et un seul quai dans la boucle d'Auteuil ; Michel-Ange Auteuil sur cette même ligne 10 pourrait rejoindre ce petit club, car la seconde voie n'est autre que le raccordement avec la ligne 9 ;
  • Louis Blanc (lignes 7 et 7bis) est en réalité constituée de 2 stations, une par sens, gérant l'ancienne bifurcation vers les branches de La Villette et du Pré Saint Gervais ;
  • Varenne (ligne 13) dispose de 3 voies, étant à la base sud de la boucle des Invalides, autrefois utilisée comme terminus et atelier de maintenance ;
  • Lourmel (ligne 8) dispose aussi de 3 voies sans avoir été terminus : la voie en impasse est utilisée pour la manoeuvre d'accès à l'atelier de Javel ;
  • Cluny La Sorbonne (ligne 10) dispose d'une voie centrale sans quai, pour la jonction avec la ligne 4.

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Levallois - Anatole France - 17 mai 2012 - Une des 3 stations à quais décalés du réseau, dans une configuration très particulière puisque la disposition en quinconces n'est que partielle pour ajouter l'implantation de la station à l'occupation du sous-sol. © transportparis

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Cluny La Sorbonne - 18 mars 2017 - Voie centrale mystérieuse car généralement les raccordements sont bien cachés dans les tunnels, mais ici, il traverse une station d'où cette grande voûte. © transportparis

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Eglise d'Auteuil - 22 août 2019 - La moins fréquentée des stations du réseau dispose d'une seule voie et d'un seul quai puisqu'elle est située sur la boucle d'Auteuil. Pas de banc ni de siège, car c'est aussi une station dans laquelle on quitte le réseau plutôt qu'on n'y accède ! © P. Tak

Les terminus

A l'origine, ils comprenaient une boucle : Porte Maillot, Porte de Vincennes, Porte Dauphine, Nation, Villiers, Gambetta, Porte des Lilas, Porte d'Orléans, Porte de Clignancourt, Porte de Champerret, Place d'Italie, Etoile, Gare du Nord, Porte de La Villette, Pré Saint Gervais, Porte d'Auteuil et Invalides.

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Le terminus de la boucle d'Auteuil au début des années 1970, avec 3 voies à quai dans une disposition peu courante avec la voie centrale encadrée par 2 quais. (cliché X)

Les trains étant devenus réversibles, cette disposition est devenue superflue. Etrangement, le Nord-Sud avait aménagé une boucle à la porte de Clichy alors que ses trains étaient réversibles.

Si le cas général est ensuite devenu la station à deux voies avec arrière-gare de manœuvre, plusieurs terminus se sont distingués par leur configuration liée aux grands trafics. Porte de Saint Cloud sur la ligne 9 dispose de 5 voies à quais. A l’autre extrémité, Porte de Montreuil en comporte 4, tout comme Château de Vincennes sur la ligne 1 et Porte de Charenton sur la ligne 8.

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Travaux de construction de l'entonnement du tunnel de la station Porte de Montreuil sur la ligne 9. (cliché X)

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Porte de Montreuil, probablement au début du prolongement à la mairie de Montreuil - La station est éclairée avec de simples ampoules. La voûte de grande largeur était alors une réalisation remarquée par le volume dégagé. (cliché X)

Pont de Levallois (ligne 3), Porte d’Orléans (ligne 4), Balard et Créteil Préfecture (ligne 8), Pont de Sèvres (ligne 9), Châtelet (ligne 11), Carrefour Pleyel et Chatillon Montrouge (ligne 13) disposent de 3 voies (exceptions faites de modifications ultérieures comme Porte d’Orléans).

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Porte d'Orléans - 14 avril 2018 - Ce n'est plus un terminus mais cette station le fut pendant plus d'un siècle. Configuration particulière avec 3 voies à l'origine d'un retournement en boucle, avec couverture métallique et piliers dans l'entrevoie du fait de la largeur de l'ouvrage. A noter la récente redécoration des murs avec des carreaux d'inspiration métro mais d'un format agrandi, liée notamment à la réalisation de l'accès visible au premier plan. © transportparis

Les terminus des lignes bis sont également atypiques : à Gambetta, les deux voies sont en impasse sans arrière-gare, implantées dans l’ancienne station de départ de la ligne 3. A Louis Blanc, sur la ligne 7 bis, les trains effectuaient aux débuts de l’exploitation autonome (en 1971) une manœuvre en Z afin de déposer les voyageurs dans la station en direction d’Ivry et les reprendre dans la station en direction de La Villette.

Suite du dossier : la décoration des stations

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