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transportparis - Le webmagazine des transports parisiens

Le tunnel Châtelet Les Halles - Gare du Nord

C’est un sujet récurrent dans la plupart des débats sur le devenir des transports franciliens. Lors de la création du RER D, il a été – heureusement – décidé de ne pas le faire circuler en tronc commun avec le RER A entre Gare de Lyon et Châtelet Les Halles… mais de l’insérer entre les trains du RER B pour atteindre Gare du Nord.

tunnel-CLH-PNO

Doubler, oui mais comment ?

Vaste question, d’autant plus complexe qu’il faut évidemment intégrer la géographie déjà complexe du sous-sol parisien et celle du réseau ferroviaire.

RER-B-RER-Dchatelet

Châtelet - Gare du Nord ou le tronc commun qui agite le débat sur les transports franciliens depuis plus de 30 ans... (cliché X)

Une première étude a été réalisée par la RATP en 2003 évaluée à 700 M€ de l’époque mais hors modalités de raccordements

Un schéma dédiant l’ouvrage existant au RER B impliquerait un nouveau tunnel pour le RER D… mais pas seulement. Il n’est pas possible de créer un « tube » qui débuterait à la tête nord de Châtelet Les Halles et s’achèverait à la tête sud de Gare du Nord pour conserver la desserte actuelle des deux gares. Conséquence : il faudrait ajouter deux nouvelles gares au nouveau tunnel, avec d’autres questions :

  • comment quitter le tunnel existant venant de Gare de Lyon pour rejoindre le nouvel ouvrage ?
  • où peut-on insérer des gares de 260 m de long et au moins 20 m de large pour desservir leur cœur de Paris et la gare du Nord souterraine existante ?
  • comment rejoindre les voies du RER D en direction d’Orry la Ville ?

A cette première salve de question, on peut rappeler que la SNCF avait un temps envisagé une liaison similaire – mais plutôt pour les trains à grande vitesse – via une nouvelle gare centrale du côté de la place de la République…

On retrouvait cette hypothèse dans les travaux réalisés alors par RFF pour le STIF, évaluées entre 2 et 4 MM€

Ce qui amène à de nouvelles interrogations et finalement à envisager un ouvrage bien plus vaste allant en gros de Bercy-Conflans à La Chapelle. C’est plus long… et nécessairement plus cher, avec le devenir des 4 voies souterraines de Gare de Lyon : elle pourrait accueillir les trains de la ligne R, mais uniquement en UM2, car les rames en UM3 font 15 m de plus que les quais (330 m pour 315 m). Autant dire pas au moment où on en aurait le plus besoin...

Evidemment, un schéma inverse avec un nouvel ouvrage pour le RER B aboutit aux mêmes conclusions.

La FNAUT avait mené sa propre étude avec un premier tube à l’est de l’ouvrage existant, dédié au RER B dans le sens nord-sud. Il y aurait alors 3 voies, pour écouler le RER B vers le nord et le RER D dans les deux sens, ce qui supposerait une voie centrale banalisée (l’actuelle voie nord-sud) : contraignant surtout s’il faut augmenter la fréquence…

L’ajout d’un tube à l’ouest, pour le RER B vers le nord apparaît plus complexe encore avec des effets importants sur l’exploitation du RER A. Bref, le champ des possibles est tout de même assez restreint !

Tunnel existant : rapprocher la théorie de la pratique

Avec une vitesse maximale de 90 km/h et des cantons courts, le débit du tunnel existant est de 40 trains par heure et par sens. En théorie, avec les 20 trains du RER B et les 12 trains du RER D, il n’y a pas de problème de capacité, d’autant qu’à Châtelet Les Halles, chaque ligne a ses propres voies. Gare du Nord, c’est un peu différent : le principe de base était celui de l’alternat, du fait de l’écart de trafic entre les deux lignes. Le schéma amène généralement à une succession « B-B-D-B-B-D » et dans ce cas, il peut être utile de fluidifier l’exploitation en utilisant les voies de façon indifférenciée.

Ce n’est plus le cas, du moins en situation nominale : les voies sont dédiées, ce qui peut amener à bouchonner en amont de Gare du Nord. La spécialisation a été motivée pour des raisons de lisibilité pour les voyageurs.

Pour essayer de fluidifier le trafic, un dispositif a été installé en amont des convergences vers le tunnel, pour inciter les conducteurs à lancer la fermeture des portes alors que le signal de sortie est encore à l’avertissement, en calculant le moment opportun qui lui permettra de rencontrer ensuite des signaux à voie libre. Bien utilisé, cet outil est assez intéressant : le problème est qu’il est peu pris en compte par certains conducteurs, qu’importe ce qui se passe derrière.

La formation à la conduite entre aussi en ligne de compte pour encourager les démarrages énergiques et les freinages un peu moins mollassons qu’on rencontre souvent à la SNCF du fait d’un cursus non spécialisé : un conducteur RATP sur le RER a déjà au moins 10 ans de pratique du métro, alors qu’un agent SNCF peut faire du train régional ou du fret en plus du RER. Cette non-spécialisation est, pour l’exploitation en zone dense, assez préjudiciable.

A cet égard, on en profitera pour souligner qu’il n’y a aucun dispositif dans les deux gares pour indiquer le premier train à partir. Si dans un cas, il suffit de passer sur la voie d'en face, dans l'autre, il faut changer de quai. C’est un peu gênant, car même si la fréquence est élevée, les voyageurs ont généralement l’habitude d’aller sur le quai du RER B, qui est généralement déjà bien chargé.

Reste donc la modernisation de la signalisation pour améliorer l’exploitation de ce « nœud gordien » du réseau.  Le déploiement de SACEM, qui équipe le RER A, n'est pas envisageable, le système reposant sur une technique aujourd'hui largement dépassée. La RATP, gestionnaire de l’infrastructure jusqu'en amont de Gare du Nord, a bien un temps essayé de pousser au développement de son propre outil, mais étant partie prenante en appui (alors pour RFF) du projet NExTEO pour le RER E, il aurait été malvenu d’envisager de travailler sur un produit concurrent répondant pourtant aux mêmes objectifs. Ile de France Mobilités a fini par organiser la convergence entre les deux opérateurs en refusant - logiquement - la démultiplication de solutions que se seraient avérées incompatibles bien que très probablement cousines.

Le RER D sera donc être équipé de NExTEO sur son tronçon central, de Saint Denis à Villeneuve Saint Georges. L’ensemble des RERng aussi. Quant au RER B, la RATP et la SNCF ont finalement décidé d’équiper toute la ligne puisque l’échéance de renouvellement du matériel roulant (départ des MI79-MI84 et arrivée des MI20) coïncide avec celle de la fin de vie des équipements de signalisation.

Reste maintenant à évaluer précisément la capacité procurée par ce nouveau système sur le tronc commun. Les premiers calculs étaient décevants puisque le seuil des 32 trains théoriques n’était pas atteint. Avec un investissement de près d’un milliard €, c’est gênant. Il faudrait au moins atteindre les 36 trains de sorte à pouvoir proposer une mission de plus sur l’une des deux lignes. Pourtant, avec une vitesse de 90 km/h en ligne, des gares avec au moins 4 voies accessibles à 60 voire 70 km/h et des matériels avec un bon niveau de performance, les ingrédients sont tout de même réunis.

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