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transportparis - Le webmagazine des transports parisiens
1 juillet 2015

Les 40 ans de la Carte Orange

Il y a 40 ans, un morceau de plastique orange accompagné d'un ticket à piste magnétique allait constituer une petite révolution dans les transports parisiens. Le 1er juillet 1975 apparaissait la Carte Orange et le nouveau système tarifaire qui allait s'appliquer sur le périmètre du Syndicat des Transports Parisiens, qui ne couvrait à l'époque pas toute la région Ile de France.

La tarification en Ile de France avant la Carte Orange

Avant son apparition, chaque service de transport en commun avait son propre fonctionnement. Sur le périmètre de la RATP, il fallait composer avec le principe du sectionnement des lignes d'autobus : un ticket pour 3 sections et un ticket supplémentaire toutes les 2 sections. En outre, la correspondance entre lignes n'était pas possible, pas plus qu'avec le métro. L'abonnement hebdomadaire - valable 6 jours - pour un trajet avait été créé en 1941. En revanche, en 1967, le ticket U était créé, procédant d'une uniformisation tarifaire entre le métro (qui fonctionnait depuis les origines sur le principe du tarif unique pour un trajet) et le réseau routier.

L'embryon de RER constitué d'abord de la ligne de Sceaux, puis de celles de Boissy Saint Léger et de Saint Germain en Laye, étaient basées sur une tarification à la distance. L'apparition du RER coïncidait avec celle du ticket à piste magnétique et des tripodes dans les stations, succédant au poinçonneur et au rituel - fastidieux à l'heure de pointe - de la pince. Dans les autobus, l'arrivée des autobus Standard accélérait la rationalisation du service avec la disparition des receveurs.

Enfin, la SNCF avait elle aussi sa propre tarification fondée sur la distance parcourue, avec ses propres abonnements hebdomadaires et mensuels. En résumé, il fallait utiliser jusqu'à 5 systèmes tarifaires différents pour effectuer un voyage en région parisienne, d'autant que chaque réseau d'autobus local disposait de sa propre tarification. Ainsi, de Versailles à Paris, le voyageur devait avoir en poche un ticket de la SVTU, un billet de train pour Paris, un ticket de métro et ou un ticket d'autobus.

1975 : la révolution magnétique

1975 arrivait donc comme une révolution poursuivant un unique objectif : simplifier ce qu'on qualifierait aujourd'hui de jungle tarifaire en proposant un abonnement mensuel valable sur l'ensemble des réseaux du périmètre géré alors par le STP quel que soit l'exploitant, dans un contexte difficile pour les transports publics. Les années 1960 furent celles de l'explosion du trafic automobile et d'une érosion continue de la fréquentation des transports en commun qui souffraient non seulement d'un certain manque d'investissement (voitures du métro datant encore pour large partie d'avant 1920, autobus des années 1930) et d'une image rattachée aux années sombres de l'occupation. Le début des années 1970 constituait un creux historique à l'époque où on imaginait la disparition des autobus et la création de multiples autoroutes dans Paris.

Choc pétrolier de 1973 : le facteur déclenchant

Mais le choc pétrolier de 1973 est venu bousculer ce mouvement de régression des transports en commun et imposait un renversement des orientations. Il fallait faire des économies d'énergie et, bien plus efficace que l'arrêt des programmes de l'ORTF à 23 heures, la relance des transports en commun devait constituer la réponse la plus appropriée.

La naissance de la Carte Orange devait être un succès phénoménal qui allait inverser la courbe de fréquentation des réseaux. Elle était d'autant plus nécessaire à l'approche de la mise en service complète du premier réseau de RER. En à peine 6 mois, plus de 900 000 Carte Orange avaient été délivrées, d'abord uniquement aux salariés avec la prise en charge de 50% de l'abonnement par l'employeur, une mesure alors vivement contestée par le patronat. La fréquentation sur le seul réseau d'autobus de la RATP augmentait en une seule année de 40%.

La Carte Orange était en outre accompagnée d'une politique d'offre avec la naissance des Lignes Pilote dans Paris, bénéficiant de couloirs réservés sur une part significative de leur trajet, et l'accélération du renouvellement du parc d'autobus. Signe le plus visible, les PGR à gabarit réduit arrivés en 1968-1970 allaient se retrouver notoirement sous-capacitaire du fait de la hausse rapide du trafic, précipitant leur remplacement par des SC10 .Des campagnes d'autopromotion étaient lancées, affichées sur les autobus avec le célèbre "C'est moi ou 40 voitures" ou "Paris suffoque, je prends l'autobus".

De la Carte Orange au Navigo

Jusqu'en 1991, la Carte Orange concernait donc le périmètre du STP, qui ne couvrait pas toute l'Ile de France, avec 5 zones. En 1991 furent créées les zones 6 à 8 afin de couvrir tout le territoire régional et assurer le maintien d'une équité tarifaire fondée sur la distance. Elle fut ensuite déclinée en une version hebdomadaire et une version annuelle, afin de mieux correspondre à la diversité des besoins.

Parallèlement, l'offre de tickets continuait d'être simplifiée par étape, avec d'abord l'abolition du sectionnement tarifaire en 1999, la création en 2003 par le STIF du ticket T valable sur l'ensemble des réseaux d'autobus d'Ile de France puis en 2007 du ticket T+ offrant - enfin - la correspondance entre lignes d'autobus et de tramways... mais pas avec le métro.

En 2009, la Carte Orange a disparu, définitivement remplacée par la carte à puce Navigo, appelée à devenir un support multi-abonnements, y compris pour les nouveaux services de mobilité tels que Vélib ou Autolib. On peut y charger son abonnement et des titres occasionnels (compléments de parcours, carnet de ticket...) mais 2015 marquera un tournant - reste à savoir s'il sera réellement positif - avec l'abandon du zonage tarifaire, qui depuis 5 ans, a déjà été sérieusement entamé en supprimant les zones 6 à 8 par extension de la zone 5. Le 1er septembre prochain, l'abonnement tous réseaux en Ile de France sera le premier dans une mégapole de 12 millions d'habitants à proposer un tarif unique à 70 € par mois. Une mesure d'équité pour les uns, une dépense supplémentaire au détriment des investissements sur les réseaux pour les autres.

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18 décembre 2014

Tarification unique : ce qui n'est pas dit...

Le site Mobilettre publie un nouvel article concernant les négociations sur le financement de la tarification unique et quelques éléments jusqu'à présent passés sous silence, à lire ici. Croustillant à souhait !

Une question : jusqu'à quand durera cette mesure ? Car ses partisans ont beau affirmé de façon péremptoire que "l'intendance suivra", quand on se borne à ce genre de réponses, c'est qu'on n'a rien d'autre à avancer pour se justifier.

25 novembre 2014

Tarification unique : dernière ligne droite ?

Promesse de campagne et objet d'un accord entre les socialistes et les écologistes pour obtenir une majorité à l'assemblée régionale, la tarification unique pourrait cette fois-ci aboutir. Cherchant à ne pas plomber les comptes du STIF et à éviter d'exporter tout le financement la mesure sur les entreprises par des temps où l'instabilité fiscale doit être combattue, le Président de la Région est parvenu à un projet d'accord avec la Chambre de Commerce et d'Industrie. Le Versement Transport n'augmenterait que de 0,13 %, et les entreprises pourrait réduire en compensation la valeur du remboursement des abonnements à leurs salariés tout en restant sur le taux de 50% puisque le tarif serait uniformisé à 70 € sur tout le territoire régional. Et encore, cette hausse de 0,13 % ne concernerait que les entreprises situées en petite couronne. La baisse des charges liée à la réforme tarifaire génèrerait 70 à 80 M€ d'économie par an pour les entreprises. La Région de son côté s'engage à rationaliser ses dépenses pour couvrir le coût de cette mesure et le manque de recettes pour le STIF, oscillant entre 300 et 400 M€.

Pour la Région, cela n'obère pas les capacités d'investissement sur le réseau, ce que pointe poutant la FNAUT en rappelant que les usagers attendent d'abord une amélioration de la capacité et de la régularité des réseaux de transport. Si la tarification unique affecte le budget d'exploitation du STIF, mécaniquement, la hausse de ce dernier impactera la capacité d'investissement et les marges de manoeuvre sur l'évolution de l'offre. Or précisément, on peut redouter une hausse de la fréquentation en grande couronne qui affecterait la qualité de service en faisant planer le risque de saturation des trains... dont la capacité résiduelle est assez faible.

En outre, la FNAUT souligne que le coût journalier du déplacement reste de l'ordre de 2,50 € pour un Navigo zones 1-5. En revanche, l'écart entre le prix moyen du déplacement avec un abonnement et ticket au détail n'a cessé de croître. Il faut compter par exemple 19,90 € pour un aller-retour Paris - Montereau contre 3 € avec un Navigo.

On pourra aussi ajouter que la tarification unique ne sera pas sans effet sur les TER des Régions voisines : le mur tarifaire existant va être amplifié et créer immanquablement un report de fréquentation sur les premières gares Ile de France au détriment des TER, avec pour risque une chute de fréquentation de nature à justifier une diminution de l'offre sur ces relations régionales.

Reste un dernier cap à franchir et non des moindres : la validation du gouvernement du déplafonnement du Versement Transport en Ile de France, faute de quoi la mesure ne pourra être appliqué. Mais suffit-il d'être une promesse électoral pour être une mesure souhaitable car pertinente ? N'est-on pas là en pleine démagogie à un an des élections régionales ? L'énergie dépensée par les élus régionaux à rechercher de nouveaux financements est louable, mais l'affectation est disctuable, d'autant que nombre de projets attendent leur plan de financement (RER E, ligne 11, tangentielle nord phase 2, modernisation des RER C et D, renouvellement du matériel roulant RATP et SNCF...).

Enfin, un sujet a-t-il seulement été identifié : aujourd'hui, en limite de Région Ile de France, existe un mur tarifaire entre le Navigo 5 zones et les tarifications régionales et nationales. La baisse substantielle du prix du Navigo 5 zones devrait entraîner un report de trafic des voyageurs des franges franciliennes qui préfèreront faire un peu de voiture pour se garer dans la première gare d'Ile de France. Conséquences :

  • saturation amplifiée des capacités de stationnement dans ces gares (Montereau, Souppes sur Loing, Rambouillet, Houdan, La Ferté sous Jouarre, Persan-Beaumont, pour ne citer que quelques exemples)
  • saturation amplifiée des trains Transilien en tête de ligne côté banlieue du fait d'un report de fréquentation des TER sur les Transilien
  • perte de trafic et donc de recettes sur les TER de nature à provoquer un affaiblissement de l'offre au détriment des utilisateurs des TER, les gares des franges franciliennes dimensionnant l'offre TER
  • pour les franciliens, disparition d'un critère de choix de localisation du domicile avec la neutralisation de l'effet prix des transports

Lire aussi l'éditorial, ciselé, de Mobilettre à ce sujet.

MISE A JOUR du 7.12.2014 : La tarification unique sera mise en place le 1er septembre 2015.

14 octobre 2014

Bientôt la tarification unique ?

Engagement de l'accord électoral en 2010 entre le PS et les Verts, la tarification unique dans les transports franciliens pourrait finalement aboutir. Niveler l'ensemble des tarifs sur le niveau de la zone 1-2 actuelle est désormais présenté comme une mesure de pouvoir d'achat pour les ménages, mais aussi comme un allègement de charges pour les entreprises puisque si la part prise en charge par l'employeur (50%) restait la même, le moindre coût de l'abonnement allègerait donc la valeur de cette part.

En compensation, les entreprises situées dans les zones 1 et 2 devraient s'acquitter d'un Versement Transport augmenté de 0,2 points. Quid des entreprises situées à La Défense qui sont en zone 1-2 si on raisonne "Métro" mais en zone 3 si on raisonne RER ?

Restent tout de même quelques questions en suspens :

  • comment gérer l'effet de la mesure tarifaire sur la fréquentation des trains et donc sur leur nombre dans un système à la capacité non seulement contrainte mais de surcroît saturée ?
  • comment financer la mesure sachant que le gouvernement est opposé à la hausse du Versement Transport ? D'autres pistes seraient étudiées comme la demande du retour de la TVA sur les transports à 5,5% au lieu de 10%, la hausse des carburants et une taxe sur les surfaces de parking dans les centres commerciaux
  • comment gérer à terme une baisse des recettes avec la hausse de l'offre de transports liée à la mise en service du Grand Paris Express ?
2 décembre 2013

La tarification unique reportée sine die

Le projet de tarification unique en Ile de France a-t-il vécu ? Non répondront les élus partisans de cette solution.

Des regards extérieurs pourraient tout de même avoir un avis légèrement différent. Alors que le STIF semble devoir serrer l'ensemble de ses budgets et doit inéluctablement faire face à un important besoin de renouvellement du parc de matériel roulant dans les 10 prochaines années, tant sur le Métro, le RER que le Transilien, et alors même que la hausse de la TVA sur les transports publics lui coûtera 100 M€ par an, la suppression des zones tarifaires, estimé entre 300 et 400 M€ par an, devenait une position insoutenable alors que l'autorité organisatrice recherche de nouvelles ressources.

Quant à la hausse du Versement Transport acquitté par les entreprises pour financer cette mesure, elle ne figure pas dans la loi de finances 2014 et on peut le comprendre : avec l'écotaxe, les bretons démolissent les portiques ; avec une hausse du VT, on pouvait craindre pour les portillons du Métro...

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25 juillet 2012

Tarification unique : coûteuse démagogie ?

Alors que le manque de lignes de rocade et que la saturation des réseaux radiaux constituent des constats largement partagés par tous les observateurs et décideurs du paysage des transports franciliens, le dossier de la tarification fait figure de pilier des débats.

Le groupe Ecologiste, composante de la majorité régionale, veut aboutir à une tarification unique sur toute l'Ile de France, abolissant le principe de tarification selon la distance. Sous couvert de bonnes intentions bien démagogiques, la tarification unique n'est pas exempte de défauts.

A commencer par un simple constat de bon sens : faire Opéra - République en métro ou Paris - Nemours en Transilien, est-ce la même chose ? Assurément non, surtout si on transpose la comparaison à une région de province : faire Prado - Noailles en métro à Marseille n'est pas tout à fait la même chose que relier en TER Marseille à Cavaillon. Les produits étant résolument différents, la tarification ne saurait être la même étant donné que les coûts de production du service ne sont pas les mêmes.

La bonne réponse est bien la mise en oeuvre de tarifications multimodales qui permettent aux voyageurs de passer du réseau régional à la desserte urbaine sans jongler entre des abonnements différents. En Suisse, pays de l'intégration ferroviaire par excellence, l'abonnement général n'est pas au prix de l'abonnement urbain d'une des villes : on ne paie pas le même prix pour aller de Plainpalais à la gare Cornavin dans un tramway genevois et pour aller de Genève à Lausanne à bord d'un train régional.

De façon un peu plus complexe, l'uniformisation tarifaire peut avoir des effets de bord aux limites de la Région Ile de France. Si, comme on l'entend, le prix de l'abonnement passe à 65 euros y compris pour la grande couronne, alors il est plus que probable que les utilisateurs du TER à une dizaine de kilomètres des limites de l'Ile de France choisiront, pour faire des économies, de prendre leur voiture pour arriver à la première gare en tarification Ile de France. Il y aurait donc un effet de report du TER vers le Transilien, au détriment de l'économie du TER, dont les coûts de production resteraient identiques, mais avec une baisse des recettes et donc un risque sur la stabilité du nombre de trains.

 

060311_RCR2montereau1Montereau - 6 mars 2011 - Les TER desservant les territoires proches de l'Ile de France pourraient être impactés par l'apparition d'une tarification unique en Ile de France calquée - pratiquement - sur le tarif le moins élevé : l'inévitable report de trafic serait-il gérable ? Les spécialistes en doutent... © transportparis

Et par symétrie, le report sur des Transilien viendrait accentuer le problème de charge des trains aujourd'hui bien connu y compris sur les liaisons de grande couronne où la fréquence est de l'ordre de 30 minutes. Renforcer les dessertes supposerait que le réseau ait aujourd'hui la capacité d'accueillir des circulations supplémentaires en heures de pointe (ça se saurait !)... et de financer des trains supplémentaires, alors même que les recettes, elles, diminueraient du fait du nivellement tarifaire par le bas.

En matière d'aménagement du territoire, la tarification unique est par essence contraire aux conceptions de ses promoteurs, notamment par rapport à la maîtrise de l'étalement urbain. En faisant sauter le verrou du prix des transports, la tarification unique ouvre une véritable autoroute à l'urbanisation des territoires excentrés, alors que la maîtrise des déplacements incite plutôt à une politique de densification de la proche couronne.

Enfin, la question économique. Estimée à "seulement" 250 millions d'euros par an par les plus optimistes (généralement les promoteurs de cette réforme) et à 500 millions par les plus pessimistes (et peut-être les moins favorables à ladite évolution), cette dépense annuelle est par les temps qui courent un sujet qui ne saurait être mis sous le tapis.

N'y a-t-il pas plus urgent pour répondre aux besoins de l'Ile de France ?

Même en prenant un point d'équilibre entre les deux hypothèses de coût annuel, c'est à dire (250+500) / 2 = 375 millions d'euros par an, ce montant représente l'équivalent du financement d'une ligne de 10 km de tramway par an (aux coûts moyens de l'agglomération parisienne) , ou de 3 km de métro sur la même période.

Les vrais besoins ne sont-ils pas plutôt de ce côté ?

12 juillet 2012

Week-end : on dézone !

A partir du 1er septembre, les abonnés Navigo pourront circuler dans toute l'Ile de France le samedi et le dimanche, quel que soit le nombre de zones de leur titre de transport. D'un coût de 37 millions d'euros par an, cette mesure est destinée à inciter les franciliens à utiliser les transports en commun pour leurs loisirs.

Le STIF mettra aussi en place au plus tard en fin d'année le ticket de complément de parcours permettant ponctuellement d'aller au-delà du forfait en semaine.

Quant au tarif unique pour tous, il est encore loin d'aboutir, car le coût de la mesure est élevé, entre 250 et 500 millions d'euros par an, et conditionné à la hausse du Versement Transport qui nécessite un vote à l'Assemblée Nationale.

Cependant, vu le coût de la mesure, il y a probablement plus utile à faire pour améliorer le fonctionnement du réseau que de mettre en oeuvre une mesure qui n'aura pour effet que de grèver les finances du STIF et ouvrir encore plus qu'elles ne le sont aujourd'hui les vannes de l'étalement urbain.

21 novembre 2011

Débat sur la tarification unique, suite

Alors que les frimas de l'automne réapparaissent, rien de tel qu'un bon débat politique sur les transports parisiens pour réchauffer l'ambiance ! En 2010, pour s'assurer une majorité, le président sortant avait conclu un accord avec le mouvement écologiste qui prévoyait notamment la mise en oeuvre d'une tarification unique des transports franciliens. Celle-ci n'étant toujours pas à l'ordre du jour, ces derniers menacent de ne pas adopter le budget 2012 de la Région si la proposition n'est pas intégrée.

Pour l'instant, ce que l'on sait, c'est que le coût de cette mesure serait de 250 millions d'euros par an, à la charge de l'autorité organisatrice, dans une hypothèse à 65 euros pour tous. Une bagatelle : c'est l'équivalent de l'achat, annuel, de 100 rames de tramway ou de 40 rames de métro...

Or déjà, ce chiffre de 65 euros fait tiquer les élus parisiens, puisqu'il représenterait une hausse d'une dizaine d'euros par mois de l'abonnement pour les zones 1 et 2. Pour stabiliser la contribution de la collectivité, le tarif mensuel nécessaire serait de 91 euros. Evidemment, pareil chiffre accentue l'opposition de la zone la plus dense, la plus peuplée, et pas forcément la plus riche.

A défaut de faire supporter ce coût sur les usagers, et faute de pouvoir augmenter la contribution des collectivités aux budgets serrés, les entreprises pourraient être sollicitées : opposition totale du côté du MEDEF qui rappelle qu'il contribue déjà à 45% au déficit d'exploitation par le Versement Transport.

Question de fond : est-il justifié d'unifier la tarification sur un territoire aussi vaste que l'Ile de France ? Il faut bien admettre que le coût d'un voyageur augmente avec la distance à parcourir alors que le potentiel de trafic s'éloigne au fur et à mesure qu'on s'éloigne de Paris. Bref, aller chercher un voyageur de plus du côté de Souppes-sur-Loing ou de Nogent l'Artaud coûte bien plus cher à la collectivité que prendre en charge un usager de plus entre Clamart et Paris.

Par ailleurs, n'est-il pas étrange, de promouvoir une baisse considérable du coût du transport en le déconnectant de la distance, de la part d'une tendance politique qui milite, à juste titre d'ailleurs, pour une densification urbaine des territoires de petite couronne pour réduire les distances parcourues et l'usage de l'automobile dans une grande couronne au maillage par les transports publics bien plus faible ? En effet, on sait très bien qu'une telle mesure aurait un effet majeur sur les modes de vie en ouvrant les vannes à un étalement urbain qui, justement, rend difficile et onéreuse l'attractivité des transports en grande couronne et génère un usage de l'automobile bien plus important qu'en zone dense. Ou comment la démagogie (tarifaire) peut conduire à contrarier les fondements d'un raisonnement politique (sur les méfaits de l'étalement urbain) qui n'est pas dénué d'un certain bon sens...

26 septembre 2010

La tarification unique en question

Ce fut un des sujets de la campagne des élections régionales du printemps, et cela risque assurément d'être un sujet difficile des prochains mois. Parmi les engagements de la majorité, et singulièrement de sa frange verte, figurait une réforme de la tarification des transports parisiens vers la suppression du système à 6 zones au profit d'un tarif unique.

Première question : à quel prix ? L'opposition régionale annonçait 50 euros, la frange verte de la majorité parle de 85 euros. Quoi qu'il en soit, l'objectif poursuivi est de réduire le coût de l'abonnement pour les habitants les plus éloignés de Paris... On peut s'interroger sur la pertinence d'une telle orientation alors même que de tous bords politiques, on considère désormais indispensable de lutter contre l'étalement urbain et engager une politique de redensification de la proche couronne. Abaisser les tarifs des trajets les plus longs est assurément un levier incitant les franciliens à se domicilier toujours plus loin en diminuant le coût du transport dans leur budget.

Il faudra par ailleurs "vendre" ce tarif unique avantageux pour la grande couronne aux habitants de Paris et de la petite couronne qui eux verraient leur titre de transport augmenter, jusqu'à 15 euros par mois pour les parisiens. Or l'équation selon laquelle les populations les plus aisées sont dans Paris et les plus défavorisées en lointaine banlieue prend du plomb dans l'aile si on prend comme contre-exemples : la liste serait longue mais la comparaison entre la vallée de Chevreuse et les arrondissements du nord-est parisien n'abonde pas vraiment en faveur de l'argumentation généralement développée.

Il faudra aussi mesurer l'impact sur les moyens disponibles pour financer les transports en commun en Ile-de-France. Une augmentation du déficit d'exploitation par une diminution des recettes tarifaires n'aurait-elle pas un impact sur les investissements de la Région pour construire de nouvelles lignes de RER, de métro ou de tramways ?

Bref, est-il cohérent de vouloir unifier la tarification des transports en Ile-de-France générant une diminution importante du coût des déplacements vers la grande couronne d'une part, et mener une politique de densification de la petite couronne pour maîtriser justement les déplacements. En d'autres termes, maintenir un tarif différencié selon la distance des déplacements n'est-il pas un outil de cette politique de densification ?

D'autre part, abaisser le tarif des transports en grande couronne augmenterait le fossé entre les tarifications francilienne et régionale, incitant les habitants des départements limitrophes à rejoindre encore plus qu'aujourd'hui la première gare sous tarification francilienne. A la clé assurément, un engorgement grandissant des accès à ces gares et des problèmes de stationnement d'une part, et une perte sèche de recettes pour les TER qui risque de créer des tensions entre les Régions du Bassin parisien et l'Ile-de-France.

Enfin, avec le développement de projets de rocades destinées à palier les carences d'infrastructures de transport en commun sur les déplacements banlieue - banlieue, ne serait-il pas plutôt temps de réfléchir à une toute autre structure de la tarification pour tenir compte de l'apparition de nouvelles offres de transport non plus seulement radiales mais aussi en rocade ? Sans aller jusqu'à faire admettre qu'aller chercher un voyageur supplémentaire à 80 / 100 km de Paris coûte plus cher à la collectivité qu'aller capter un voyageur supplémentaire en petite couronne du fait des coûts d'exploitation rapporté au trafic, la tarification des transports est un exercice trop difficile pour que des raisonnements aussi simplistes puissent être les plus appropriés...

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